Goyô – Le samouraï à l’odeur de feuilles mortes
La case horaire noitaminA de la chaîne FujiTV, en troisième partie de soirée, a été lancée pour mettre en avant des séries qui s’adressent à un public plus large que le spectateur traditionnel de séries animées. En clair, elle vise des jeunes adultes plutôt que l’otaku moyen. C’est à cette tranche horaire que l’on doit Honey&Clover, Nodame Cantabile ou les récents Tokyo Magnitude 8.0 et Higashi no Eden l’année dernière. Inutile de dire que chacune de ses séries est généralement très attendue. Mieux, depuis cette saison, et pour préparer son ouverture vers les dramas cet été, la case horaire est maintenant doublée. C’est donc deux séries estampillées noitaminA auxquelles nous avons droit ce printemps. Goyô est l’une d’entre elles.
Adaptation du manga éponyme de Natsume ONO, l’auteur du Ristorante Paradisio adaptée l’année dernière, cette série est produite par le studio Manglobe, fondée par des anciens de Sunrise et surtout reconnue pour avoir été la nouvelle terre d’accueil de Shinichirô WATANABE qui a depuis laissé la place aux jeunes pousses. Comme Michiko e Hatchin l’année dernière, le studio atypique a réunie un staff plutôt neuf pour cette série avec Tomomi MOCHIZUKI à la réalisation et à l’écriture du scénario qu’on aura surtout connu avant pour Zettai Shônen. Michie WATANABE (un lien de parenté avec Shinichirô ?), qui avait déjà officiée sur certains épisodes de Samurai Champloo, se voit confiée la direction artistique et nous offre des décors d’époque pour le moins détaillés. Le chara-design signé Kazuto NAKAZAWA (Les Lendemains de Nadja), s’il n’emporte pas mes suffrages, semble assez fidèle aux traits de ONO si je me base sur les quelques planches que j’ai vues en comparaison. Mais certains tauliers sont aussi là pour assurer la baraque avec Yoshimitsu YAMASHITA (Madlax) à l’animation et Kazuhiro YAMADA (Ergo Proxy, Death Note, Sakura no Mori no Mankai no Shita in Aoi Bungaku Series) à la photographie. On retrouve le duo Kayo KONISHI et Yukio KONDO pour la musique, un tandem dont vous avez déjà pu entendre les compositions sur I »s et Elfen Lied.
Masanosuke AKITSU, surnommé plus simplement Masa, est un ronin, un samouraï sans emploi. Il voudrait bien se faire embaucher comme garde du corps mais si ses compétences de guerrier ne sont pas remis en cause, son caractère trop effacé – qu’on pourrait penser idéal pour ce travail – prive son seigneur de s’enorgueillir du prestige d’avoir un samouraï à son service. Au chômage, et afin de pourvoir autant à ses besoins qu’à ceux de sa famille, Masa accepte presque contre son gré de se mettre au service de Yaichi, un bien étrange personnage. Ce Yaichi s’avère être en fait le chef d’une bande de kidnappeurs ! Cette bande se fait appeler les Goyô (les « cinq feuilles ») et même si au départ Masa et son enseignement de samouraï sont assez peu enthousiastes, il va se retrouver de plus en plus impliqué dans la bande et ses membres pour le moins particuliers : le taciturne Ume, le trouble Matsukichi, la séductrice Otake et la jeune Okinu.
Manglobe, une série diffusée lors de la case noitaminA, un chambara qui égratigne l’idéal du samouraï : trois bonnes raisons pour que je m’intéresse à Goyô. Techniquement, je peine à pleinement m’emballer. Je ne suis vraiment pas fan du chara-design même si, selon l’expression consacrée, je salue cette forte identité visuelle. Les décors sont réussis, crasseux et poussiéreux à souhait, sombres par endroit même s’ils sont parfois heureusement égayés de quelques touches de couleurs. Les combats ne sont pas légion – on n’a vu en fait que quelques secondes de passages d’armes en trois épisodes – mais le peu que Goyô nous offre est pour le moins réjouissant. J’attends quand même d’en voir plus pour porter un jugement plus définitif mais le passif de Yoshimitsu YAMASHITA plaide en sa faveur. Je retiens surtout la bande sonore qui joue intelligemment sur l’anachronisme et l’éclectisme (j’ai cru entendre de l’accordéon façon musique de l’entre-deux-guerres à un moment) : deux qualités qui se retrouvent conjuguées de concert dans le générique de début.
Je ne sais pas quelle est la part de l’adaptation du scénario, également de la plume (ou plutôt du clavier) de Tomomi MOCHIZUKI, et du support original, n’ayant pas lu le manga de Natsume ONO, mais la narration est l’atout maître de Goyô. Les personnages ne nous sont pas présentés de façon classique (un épisode, un personnage) mais par petites touches au détour d’une conversation ou d’un regard. Nous découvrons la bande en même temps que Masu qui cherche pour partie à s’intégrer et pour partie veut rester distant pour ne pas devenir un criminel. Là où on se serait attendu à voir les déchirements intérieurs de Masu entre son honneur de samouraï et les obligations de son nouveau travail, Goyô joue une carte plus subtile. La personnalité en retrait de Masu ne cadrait pas de toute façon avec ce genre de débat philosophique stérile. Au contraire, le rythme de l’intrigue montre avec une fluidité et une cohérence qui est un modèle du genre comment ils se retrouvent à devenir lui aussi un membre objectif de la bande tout en étant subjectivement contre leurs pratiques.
Si vous vivez en France, vous pouvez découvrir Goyô via le simulcast de son éditeur Kaze sur son site de vidéos à la demande KZPLay. Sans distribuer les bons et les mauvais points – on ignore quels sont les accords signés avec les ayant-droits nippons – pour le comparer l’offre de Kaze au simulcast que propose Dybex via la plateforme Dailymotion, les vidéos sont d’un peu meilleure qualité – quoique que ça reste du flash et que certains artefacts subsistent – et la réactivité est bien plus rapide : les épisodes diffusés par Kaze sont disponibles seulement quelques heures après la diffusion japonaise. La traduction est de qualité, audacieuse même si je ne peux juger de la fidélité, et absente de la moindre coquille. J’aurai deux gros reproches quand même à faire : les sous-titres ne sont pas toujours lisibles (des contours sur les lettres seraient les bienvenues) et surtout la présence honteuse du logo de KZPlay à chaque instant. Les chaînes japonaises mettent plutôt des logos transparents moins choquants dans l’image. Quand je pense qu’on reproche (avec raison) les teams de fansubs qui mettent leur nom en énorme, ils ont au moins la décence de se limiter à l’écran-titre.
Reste que je ne suis pas persuadé de la pertinence de la politique de Kaze. Ils ont choisi une plateforme propriétaire qui offre nécessairement moins de visibilité qu’un Dailymotion même si on peut comprendre qu’ils ont voulu avoir un outil qu’ils maîtrisent complètement. Mais l’obstacle majeur est bien celui du passage à la caisse. Kaze ne propose que du simulcast payant : 1 € pour la location pendant 48 H d’un épisode en streaming. Je trouve cette tarification excessive pour cette formule, ça pousse bien peu subtilement à opter plutôt pour un abonnement mensuel plus « rentable » avec un catalogue qui commence à s’étoffer. Je sais que sortir les chiffres de visionnages par épisode est fallacieux puisque Goyô n’est pas une série grand public mais quand même, à 60 visionnages par épisode (et encore ça n’indique pas des spectateurs uniques), l’expérience donne plutôt tort à Kaze. D’un autre côté, l’obstacle du payant arrêtera beaucoup de personnes. Et peut-être que Kaze ne veut pas (alors qu’à mes yeux il devrait justement le faire) concurrencer trop fortement leurs sorties DVD/BR. La question n’est en tout cas pas simple et seuls eux possèdent les clés. Il faut en tout cas s’enthousiasmer de l’essor de ce genre d’initiative.
3 commentaires
En tout cas pour ce que j'en ai déjà vu, je suis plus que séduite.
Après avoir consommé ce 1er épisode je ne pouvais attendre de mettre le suivant !
J'ai fini par aimer grandement les graphismes qui m'ont finalement conquis !
Les personnages sont vraiment tous attachants !
(Malgré le faite que j'ai du mal à distinguer les vieillards les uns des autres....)
Enfin, cet anime m'a captivé jusque au bout !!! \(^o^)P