Kami-sama no Inai Nichiyoubi – Le Crépuscule de Dieu.
Cet été, nombreuses sont les séries à m’avoir intriguée (tout du moins, il y en a bien plus que l’année dernière). J’en regarde un certain nombre, et parmi elles une a fini par me surprendre agréablement : Kami-sama no Inai Nichiyoubi (ou Sunday Without God en anglais). Alors certes, il y a bien d’autres animes qui mériteraient que je leur dédie un article, mais pour cette fois je me consacre à un monde crépusculaire que Dieu a abandonné.
Kami-sama no Inai Nichiyoubi (Kaminai en plus court, je vais finir par choper une tendinite avec ces titres à rallonge) est à l’origine une série de light novels, des romans au système d’édition assez similaire à celui des mangas : les chapitres sont d’abord publiés dans un magazine puis rassemblés en volumes. Le style est souvent assez simple et des illustrations parsèment le récit. Au sujet de Kaminai, l’auteur Kimihito IRIE (qui a d’ailleurs gagné un prix pour ce titre) a écrit pour le moment huit tomes, illustrés par Shino, desquels furent tirés un manga (trois volumes pour l’instant). Suite logique d’un concept marketing pour une franchise à succès, la série animé a été mise en route et confiée au studio Madhouse (Chihayafuru, Black Lagoon, Card Captor Sakura…). Studio qui nous livre pour le moment une très bonne prestation, malgré quelques petits défauts.
L’histoire débute avec Ai, jeune fille de douze ans dont la mère est décédée. Les habitants de son village lui confient donc le travail peu commun que sa génitrice occupait : fossoyeuse. Ces dernier(e)s ont un rôle extrêmement important : ils sont les seuls à pouvoir donner le repos aux humains en les enterrant. En effet, suite à une volonté du Seigneur, les humains ne peuvent plus ni donner naissance, ni mourir. Ou tout du moins ils meurent, reviennent à la vie et conservent leur conscience et leur corps, qui continue de fonctionner et à pourrir malgré la mort, qu’elle ait eu lieu de façon naturelle ou sauvage… Ai vit tranquillement au sein de son village, jusqu’au jour où un homme se prénommant Hampnie Hambart (le même nom que son père disparu) apparaît, élimine tous les habitants et lui révèle une triste vérité qui la conduira sur les routes…
Nous voici donc partis avec Ai. La série a été divisée en plusieurs arcs scénaristiques, et pour le moment deux ont été entièrement diffusés. Chacun d’entre eux nous raconte une histoire qui pourrait se suffire à elle-même, et qui ont un certain charme. Je conseille d’attendre que les épisodes composant un arc (trois à chaque fois pour l’instant) soient tous sortis et de les enchaîner. La première partie nous présente les personnages et ce monde qui baigne dans des couleurs crépusculaires, empli de morts continuant à vivre leur vie d’avant. Ce qui n’est pas sans risques bien évidemment, le moment où ils perdront la raison étant inéluctable et les transformera en zombies. Ce premier arc pose ainsi les bases de l’univers, assez onirique. Nous apprendrons ainsi qu’il existe les vivants, les immortels, les morts, Dieu et bien sûr les fossoyeurs, qui possèdent un rôle central. Et cela en même temps qu’Ai, la fillette de douze ans qui n’a jamais quitté son village. Quelques facilités et petites incohérences viennent ternir l’écriture de ce premier arc, mais le deuxième, Ortus, est un modèle de poésie dans son traitement. Le récit en lui-même ne l’est pas particulièrement, mais la façon dont il est mis en scène apporte un certain lyrisme, très appréciable. Semblerait-il que le scénariste, Tomoko TONPARU (Nana, Cat’s Eye, Kimi no Todoke) a trouvé ses marques après les trois premiers épisodes. J’ai ainsi retrouvé un peu de l’Odyssée de Kino dans ce deuxième arc, avec la découverte d’un pays avec ses propres règles, coutumes… Il est juste regrettable que de l’humour cliché (heureusement rare) vienne foutre en l’air l’ambiance. D’autant plus avec des thèmes comme la vie et la mort, qui nous sont sans cesse rappelés via les situations rencontrées : un immortel cherche un moyen pour enfin mourir et se faire enterrer, d’autres veulent vivre une deuxième existence en passant par la mort, l’impossibilité d’obtenir des enfants malgré le désir… La série s’apparente alors à un roman d’apprentissage avec Ai qui découvre un monde dont elle ignorait tout. Dans tous les cas, je ne me suis absolument pas ennuyée.
Les personnages sont aussi une réussite, Ai n’étant pas une énième loli cruche. Je l’avoue, son comportement m’a parfois exaspérée, mais le fait qu’elle ne connaisse rien de ce monde explique cette insouciance. Elle s’interroge, est énergique, réagit… C’est agréable. A noter qu’elle manie la pelle comme personne et est capable d’éviter les balles. Ce n’est pas tous les jours qu’on voit ça… Le « père d’adoption » Yuri Dmitriyevich, au passé tragique, apporte le nécessaire en charisme et enfin Scar est la fossoyeuse désintéressée souriante, qui intrigue de par son statut. Suite au voyage, des personnages assez particuliers apparaîtront, renfermant leur lot de surprises. C’est un plaisir de suivre cette pseudo famille sur les routes à la découverte de cet univers intriguant, magnifiquement mis en image.
Car oui, si la série a eu des difficultés à gérer la cohérence du scénario et à insuffler un rythme, le réalisateur Yûji KUMAZAWA (Oda Nobunaga no Yabô, Kissdum Engage Planet) a par contre très vite décidé du chemin à suivre et a su créer une ambiance séduisante. Son domaine, c’est le crépuscule, l’aube, la nuit et ses éclairages. Ce qui donne une atmosphère mélancolique et lyrique à souhait. L’utilisation d’effets de lumière et des couleurs chaudes illuminent l’écran et donnent une véritable identité à l’anime. Sans tout cela, les histoires n’auraient certainement pas le même impact. Le cadre joue lui aussi un rôle important. Les décors sont très riches et clairement inspirés des pays méditerranéens et même plus Dupont, de la France du sud. L’architecture des villes et des bâtiments est extrêmement soignée : la ville d’Ortus, un aqueduc romain, des cathédrales… Un délice pour les yeux. Dommage que les décors plus naturels n’aient pas eu un tel traitement. Clin d’oeil à notre beau pays : le français fait office de langue officielle, chose que l’on repère dès le joli opening (avec pour le moment une seule faute au compteur) et l’apparition surprise d’une Citroën 2 Chevaux ! A noter aussi des effets de mise en scène très dynamiques, comme celui utilisé pour nous présenter la ville d’Ortus, où la « caméra » plonge, remonte, tourne et cela sur un seul plan. Je n’ai pas réussi à m’empêcher de dire « Putain, ça rend super bien… ». Et pour coller au reste, la musique, œuvre de Hiromi MIZUTANI (La Fille des Enfers) est tout aussi réussie, avec des inspirations médiévales qui collent très bien à l’univers. L’ajout de chœur dans certaines pistes contribue à ce succès. L’animation n’est pas transcendante, mais fait son travail. On sent que l’équipe a préféré se focaliser sur l’ambiance et a donc mis le paquet de ce côté là. Il y a juste le chara-design qui me gène, bien trop commun, simpliste. Bref, il répond aux canons du genre. Sortir un peu des sentiers battus auraient sans doute été préférable… Mais le travail fourni sur le reste est bien au dessus de la moyenne, ne nous plaignons donc pas.
Kaminai est donc une série soignée, qui mériterait de rencontrer le succès. Est-ce le cas ? Je l’ignore. Je considère néanmoins qu’elle renferme suffisamment de qualités pour plaire au plus grand nombre. L’ambiance et l’univers sont vraiment les moteurs de l’anime, et on sent qu’ils ont été l’objet d’une attention particulière. La construction en arc apporte du dynamisme à la série, les personnages sont attachants… Il n’y a aucune raison pour que l’anime ne continue pas sur sa lancée. Pour ma part, et malgré quelques petites erreurs de cohérence, je suis sous le charme et je compte bien continuer ma découverte de ce monde crépusculaire.
3 commentaires
A voir ce que ça va donner...