Un jour à la Japan — édition 2017
09h40 — Au passage de la gare RER d’Aulnay-sous-Bois, le train bondé voit entrer une fille habillée en magical-girl et un autre gars en perruque rose traînant une épée en carton de deux mètres cinquante de long. Il ne fait plus de doute, nous sommes bien en direction de Japan Expo. Les traditionnelles files d’attentes bondées d’adolescent(e)s en sueur nous attendent avec délice.
10h31 — Le premier invité de marque de cette année est le vénérable producteur Masao Maruyama, 75 ans. Cet homme petit par la taille mais immense par le talent est le co-fondateur du studio Madhouse dont il a été le président jusqu’en 2012. Son nom apparait au générique d’innombrables séries cultes (Card Captor Sakura, Monster, Death Note…) et de longs-métrages (les films de Yoshiaki Kawajiri, Satoshi Kon, Mamoru Hosoda…). Aujourd’hui président du studio MAPPA, il était venu notamment présenter le long-métrage Dans un recoin de ce monde, qui sortira en France le 13 septembre 2017. Maruyama a expliqué que la production de ce film fut un des plus grands défis de sa longue carrière, au point d’être passé par un financement participatif pour boucler le budget. Par ailleurs, le récit se déroule à Hiroshima durant la Seconde Guerre Mondiale, une époque dont il ne reste aucune archive puisque tout a été détruit par la bombe atomique ; ce qui a obligé le réalisateur Sunao Katabuchi à effectuer un long travail de recherche qui rallongé les délais de production.
Lorsque Maruyama se lève pour quitter la scène, c’est cinquante ans de carrière dans l’animation qui nous contemplent. Empli de fierté d’avoir rencontré ce monument vivant, je me dirige vers le stand dédicace pour voir s’il ne serait pas possible d’approcher la légende d’encore plus près. Lorsque je vois la queue délirante et les conditions draconiennes pour obtenir le précieux sésame, je me dis que mes souvenirs seront bien suffisants.
11h34 — Au sein du festival se tient une exposition intitulée « Animé 100 » qui célèbre le centenaire de l’animation japonaise. Les visiteurs pouvaient déambuler dans un espace qui retraçait chronologiquement les œuvres les plus marquantes du média. C’était donc tout naturel d’y trouver des animes majeurs tels que Yamato, Evangelion ou Ginga Eiyu Densetsu. Mais lorsqu’on arrive à la partie des animes récents, je constate avec horreur un grand panneau Fate/Zero. Probablement une erreur du staff.
13h14 — Le jeu vidéo est toujours présent en force à la convention. A côté des énormes installations de Nintendo, Square-Enix et Bandai Namco, plusieurs autres exposants proposent de jouer dans une ambiance plus conviviale. C’est le cas de l’association Kaio Gaming avec ses bornes d’arcades et ses tournois de jeux à licence d’animes. Sur place, Shizaya est apparemment content de me voir vu les cris qu’il pousse. Il m’explique que les meilleurs joueurs peuvent remporter des Jens, une sorte de monnaie fictive qui permet d’acheter des produits de la convention. Sauf qu’on ne peut pas acheter de la nourriture avec, évidemment. Vu les prix pratiqués sur les bentos, ils auraient tort de se priver.
15h33 — La prochaine conférence est donnée par Sayo Yamamoto et Mitsuru Kubo, respectivement réalisatrice et scénariste de la série Yuri on Ice du studio MAPPA. La foule est tout simplement massive, au point que du monde est forcé de s’asseoir dans les allées ce qui est contraire aux procédures de sécurité. L’intervention commence par un clip animé inédit et absolument génial dans lequel Yuri Plisetsky fait tomber la chemise ; les fujoshis sont en transe, on les entend dans tout le hall. Lorsque ces mesdames arrivent enfin, elles passeront l’heure à évoquer les patineurs français IRL qui les ont soi-disant inspirés pour les personnages de la série. Je les connais tous, maintenant. Concernant l’anime, censé être le thème de cette rencontre, tout au plus apprend-on qu’il y aura un jour un film Yuri on Ice dont il n’y a rien à dire puisque le scénario n’a même pas encore été écrit. Ça valait le coup de faire le déplacement.
16h29 — La conférence suivante est donnée par Kenji Kamiyama, réalisateur de Ghost in the Shell Stand Alone Complex et plus récemment du film Hirune Hime, qui vient de sortir en salles en France. Le public est nettement plus clairsemé que pour Yuri on Ice, mais au moins Kamiyama a le bon goût de parler d’animation japonaise, lui. Il explique notamment avoir débuté en tant que décorateur sur des films d’animation du studio Ghibli, avant de rejoindre Production IG et de se voir confier la réalisation d’une série télévisée adaptée de GitS. L’équipe principale du studio était alors mobilisée sur le long métrage Innocence, ce qui a obligé Kamiyama à composer sa propre équipe de talents, tel Aramaki composant les membres de la Section 9, dit-il. Parmi ces talents il y avait le scénariste Yoshiki Sakurai, qui accompagnait Kamiyama à la conférence. Les deux hommes se sont longuement étendus sur les concepts politiques et technologiques qui sont au cœur de l’anime et en font encore une référence du cyberpunk. Kamiyama a d’ailleurs confié qu’il reviendrait prochainement à la réalisation d’un Ghost in the Shell, cette fois avec la collaboration de Shinji Aramaki, le gars qui a fait le film Albator en 3D.
En guise de conclusion, Kamiyama glisse un discours troublant selon lequel la violence du monde actuel, et la crise économique et sociale du Japon expliqueraient que l’animation japonaise soit moins sombre et intellectuelle qu’autrefois, et plus inclinée vers des animes simples et joyeux à l’image de son dernier film. Le public actuel serait selon lui demandeur d’animes simples véhiculant des valeurs positives plus que de productions dures et violentes. A méditer.
18H04 — La convention se vide, le public quitte Villepinte les sacs remplis de mangas, de coffrets Blu-Ray, de posters et autres marchandises hors de prix (ou pas). Pour nous aussi c’est l’heure de rentrer vers Paris, la nuit sera longue et pleine de dangers…
Remerciements à Red Slaughterer, Down, Shizaya, Dareen, Emilie, Marion, le staff de Japan Expo, et la fille déguisée en Motoko Kusanagi.
Deluxe
7 commentaires
Tu m’as redonné envie d’y aller, mais surtout pour les conférences. Les propos de Kamiyama m’ont pas mal intéressé, il y a d’ailleurs la rubrique Pixel du journal Le Monde qui a fait plusieurs interviews de certains invités. Mes dernières expériences en convention (qui doivent se compter sur les doigts d’une main en 5 ans…) se cantonnent à « Mais y a rien d’autres à faire qu’acheter ou jouer aux JV ? ». Pour le coup, j’ai l’impression qu’il n’y a que la Japan qui a les moyens de proposer des invités de « prestige » pour les conférences. Et au fait, bilan des courses : t’as claqué combien en goodies ? XD
« Fate/Zero » inscrit sur une frise de l’histoire de l’animation japonaise? Il va falloir que je continue la série (malgré le difficile épisode 1), histoire d’être témoin de cette étape importante.
De quoi a-t-il été question dans la conférence tenue par Maruyama (en dehors du film dont il faisait la promotion)?
@Rydiss : Je n’ai pas fait de folies cette fois, je n’étais pas venu pour acheter. Ce qui m’a pas empêché de dépenser beaucoup ce jour-là, que ce soit pour le resto avec les potes ou le bar qui a suivi…
@AyanamiRei : je n’ai malheureusement pas pu assister à la totalité de l’intervention de Maruyama, bien qu’ayant couru dans les allées de la Japan Expo pour tenter d’arriver à temps. De son métier de producteur il a insisté sur le fait que l’animation est un travail d’équipe, et que la partie de son travail qu’il préfère – et qu’il souhaite poursuivre – consiste de trouver des talents et à leur donner une chance. Avant de partir il a également dit que selon lui l’intérêt de l’animation c’est de pouvoir aborder n’importe quel sujet avec des styles très différents, et que c’est ça qu’il cherche à produire. Pour un compte-rendu plus complet de cette conférence tu peux aller voir ici.
Maruyama insistait également beaucoup sur l’importance des studios d’animation, la production et le financement des séries/films. Il a aussi indiqué qu’il comptait travailler dans l’animation pendant les 15-20 ans à venir, il a 76 ans au passage.
Généralement, les questions étaient surtout portées sur son expérience colossale.
Sinon le lendemain il y avait une conférence avec Maruyama, Kamiyama, Sakurai, Yamamoto et Habara (un mec qui taffe sur du mécha).
Du coup c’était très sympa de les voir un peu interagir dans leur réponses ( Yamamoto qui remercie Maruyama de l’opportunité que lui a donné son studio pour Yuri on ice …).
Globalement les thèmes abordés (CGI/Scenario/Production/Financement/Passion…) étaient bien choisis mais les questions restaient à mon goût trop en surface.
Dommage qu’on ait pas plus eu l’opportunité de leur poser nous même nos questions.
Néanmoins heureusement qu’elles sont là ces conférences, tourner toute la journée sur des stands qui te vendent tous les mêmes goodies ça va 5minutes.
Après faut venir le dimanche soir a 18h-18h30 pour les bonnes affaires, j’ai quand même réussi à avoir des posters et tableaux a -60-70% comparés aux prix du début du salon.
Egalement en faisant le tour de tous les éditeurs lors du remballage on réussit globalement à récupérer les goodies qu’ils « offrent » généralement lors de l’achat d’un manga sur leur stand.
J’ai aussi bien apprécié l’exposition Anime 100, franchement quand j’ai vu le panneau Fate Zero j’étais certain que Deluxe allait rager néanmoins ils n’ont pas fait dans le trop populaire et ont essayé de prendre des oeuvres assez diverses. Pour chaque anime il y avait une petite anecdote sur la réalisation ou la production de celui-ci ce qui donnait toujours quelque chose à lire quand on a pas envie de lire le synopsis de ce qu’on connait déjà :D
Merci pour l’article en tout cas Deluxe o/
Merci à toi pour ce retour fort intéressant sur cette journée de la Japan Expo !
Très bon article excepté que Deluxe est encore méchant avec F/Z. Pareil qu’au dessus j’aurai bien aimé aller à cet édition.
Merci Deluxe pour cet article !
J’aurai bien voulu assister à la conférence de Maruyama mais fallait bien que je tienne mon stand.
Pour l’anime 100 j’ai quand même pu visiter, c’était bien mais une grosse frustration, la présence de Gurren Lagann était vraiment rikiki par rapport aux autres œuvres :/