À bas le masque Hakuoro !

Alors que j'ai pris connaissance par un ami que la série Utawarerumono Itsuwari no Kamen était en réalité une suite d'une autre série, je me suis intéressé au premier anime soit Utawarerumono tout court (abrégé Uta aussi par endroits). Le regarder d'abord m'a paru sûrement plus judicieux néanmoins je ne ferais pas ici de comparaison avec Itsuwari no Kamen étant donné qu'auparavant il n'y avait pas lieu de le faire.

L'histoire se déroule dans un univers fictif oriental dans lequel le protagoniste nommé Hakuoro, amnésique, va vivre au gré des évènements et découvrir son passé. L'anime n'est pas mauvais et j'en garde une assez bonne impression du fait de certains thèmes abordés pour lesquels j'ai d'assez grands intérêts.

Afin de détailler le fond de ma pensée que je porte sur Utawarerumono, je vais articuler mes développements autour de deux parties. La première concerne Hakuoro qui a un poids prépondérant dans la série alors que la seconde concerne des aspects plus généraux.

1 - Une histoire reposant sur l'amnésie du personnage principal

L'histoire peut nous laisser croire qu'elle va se concentrer directement sur la découverte du passé de Hakuoro mais en réalité les premiers éléments susceptibles de nous apporter la réponse à cette question interviennent plutôt assez tard. Utawarerumono a d'abord eu l'idée de nous faire connaître le protagoniste en même temps que celui-ci apprend à se connaître lui-même et je trouve que la façon dont cet aspect a été abordé a été très intéressant.

Notre ignorance sur ce qui lui est arrivé est pourtant ce qui m'a semblé à première vue l'intrigue principale de l'anime mais, au cours des épisodes, à cause des multiples circonstances que les personnages principaux se sont trouvés confrontés, j'ai presque perdu de vue cet objectif. Hakuoro a globalement autre chose à faire que se questionner sur lui-même ce qui est un peu de dommage d'un côté mais de l'autre cela donne une tournure dynamique à la série. On a pas vraiment le temps de s'ennuyer et tout prend forme assez vite autour de lui, les "arcs" se succèdent.

Mais en restant concentré sur son amnésie, j'ai trouvé qu'il avait l'air trop désintéressé de son passé et que finalement cela l'arrangeait de ne rien savoir. Du moins, cela a duré longtemps. Deux éléments viennent pourtant renforcer cette intrigue et cela aurait pu amener Hakuoro à se questionner davantage.

Premièrement, pourquoi porte-t-il un masque impossible à enlever?

Ce fait est pour le moins symbolique car derrière celui-ci se cache la véritable identité du protagoniste inconnu de tous et comme il ne peut l'enlever, ce masque lui masque (jeu de mot foireux) à lui aussi sa propre identité. L'idée de base que je me suis dit au début serait que le masque puisse être enlevé une fois qu'il découvrira qui il est ... regardez l'anime et vous saurez.

La pensée de Hakuoro ne nous est pas exposée la plus grande partie du temps mais nous nous rendons compte à plusieurs moments qu'il fait preuve de réflexion en se demandant s'il est capable d'agir dans un tel sens ou un autre. J'ai ressenti qu'il se découvre lui-même ainsi par le biais des choix qu'il effectue.

Que dire alors de ces choix? Ses décisions sont rapidement prises en général ce qui fait de lui un personnage décidé et sûr de lui par ses agissements ce que nous pouvons lui féliciter. Je me suis étonné de voir que c'est un personnage très calme en toutes circonstances et prenant ses décisions avec maturité ce qui fait de lui un parfait leader. Au final, il est très appréciable.

À mon sens, j'en déduis qu'Utawarerumono nous fait passer le message que le passé importe peu, seuls nos actes présents sont importants. Nous sommes ce que nous faisons. Nos bonnes actions peuvent effacer les anciennes. Même si le passé de Hakuoro pourrait laisser croire le contraire (ou pas, je ne vais pas vous tout raconter non plus), cela n'aurait finalement aucune importance car les nouveaux proches qu'il côtoie ne le connaissent que tel qu'il s'est comporté depuis son réveil suite à l'amnésie.

Son masque est alors devenu porteur de son identité et on ne l'identifie qu'à travers celui-ci. Enlever son masque ferait que l'on n'aurait plus l'impression d'être d'en face de ce personnage parce qu'il s'est construit une personnalité à partir de cette image. Je pars un peu loin peut être pour certains d'entre vous mais franchement ça m'a très inspiré et je trouve qu'Uta, quelle que soit sa valeur, a au moins cette principale qualité.

Deuxièmement, pourquoi est-il le seul humain?

Étant donné qu'il est le seul "humain", puisque que tous les autres personnages sont anthropomorphiques (oreilles de loup, queue, ailes ...), il aurait du se demander pourquoi il n'existe pas d'autres de sa même espèce, bref pourquoi il est le seul "humain" à nos yeux.

D'ailleurs, ceux qui l'entourent auraient du aussi se poser la même question. Que nenni! Tout le monde a l'air d'en avoir rien à ... (autocensure)! Je suis désolé mais cela n'est pas venu à l'idée que voir un gars différent ne nous amène pas à nous poser des questions. Il ne faut pas me dire que c'est parce qu'il porte un masque qu'on va arrêter de se poser des questions, n'empêche qu'il demeure le seul à porter un masque qui est inenlevable (oui je suis néologiste à mes heures perdues).

Certes l'anime n'est pas si sérieux que ça mais bon il assume pas mal de choses quand même. Je n'appelle aucunement au racisme mais franchement il est naturel pour le genre humain de se poser ce genre de questions. Eh bah non ... pas ici ... ah oui ... parce que dans Uta ils ne sont pas vraiment "humains", j'avais oublié déjà ... excusez-moi. Bref, passons, je me suis peut être trop focalisé sur ça mais sincèrement ça m'a semblé contre tout entendement qu'à aucun moment un personnage se dise : Et t'as vu? Il a des oreilles bizarres?

C'est là que j'en profite pour vous dire que cette série crée des liens entre les personnages que je qualifierais de "familiaux". En effet, vivant au quotidien ensemble, tout ce petit monde s'est habitué aux autres, peu important sa condition, et chacun s'est rapproché plus particulièrement de Hakuoro. Une atmosphère chaleureuse s'en dégage. Ce que j'en tire, c'est qu'Utawarerumono est une histoire de famille avec Hakuoro jouant plusieurs rôles : père pour Aruruu, grand-frère pour Oboro, mari d'Eruruu (bon on l'a compris très vite hein), pour les autres c'est plus difficile à cerner. Je me contenterais de dire que ce sont des amis fidèles dont surtout Benawi sur qui il peut toujours compter.

2 - Les aspects plus généraux

Ayant mal vieilli de ses 10 ans, la qualité graphique ne m'a pas trop plu mais j'ai connu bien pire. Le plus mauvais point concerne quelques scènes en 3D. Ce sont des brèves tentatives de l'époque et il ne faut pas reprocher de suite la nouveauté. Aujourd'hui, on peut voir que ces efforts donnent de très belles choses (sauf si vous détestez tout simplement la 3D). Les scènes que j'ai intitulé "du mouvement des soldats qui courent durant une bataille" sont horribles car ces scènes ont l'air d'être au ralenti avec des mouvements chelous. Mais elles sont très brèves ne donnant pas le temps de s'apitoyer dessus alors on passe, Uta ne risque pas gros là-dessus.

Concernant le rythme de l'anime, celui-ci est assez prenant. En outre de l'intrigue qui peut déjà nous accrocher (oui c'est très utilisé le coup du gars amnésique), de nombreux évènements se succèdent rapidement mais sans précipitation. Ainsi, j'ai pu suivre facilement les premiers épisodes alors qu'un rythme plus lent m'aurait fait abandonner et ça aurait été dommage de rater la suite.

J'ai remarqué que la voix du protagoniste est la même que celui de Kiritsugu dans Fate/Zero. Ayant bien aimé ce dernier personnage de la nasuverse, je ne voulais pas découvrir que son seiyuu ait pu avoir fait auparavant la voix d'un médiocre personnage mais j'ai été rassuré que la voix corresponde bien avec Hakuoro. Comme vous avez pu le constater plus haut, je l'ai bien aimé.

Passons à un sujet un peu plus sérieux maintenant.

La série nous apporte une légère réflexion sur le pouvoir politique en tant qu'il est dans cet univers complètement assimilé au pouvoir militaire. Gouverner, c'est protéger ses frontières, sa population et prévenir toute menace extérieure. Utawarerumono ne nous fait état d'aucune autre préoccupation politique.

Cela renvoi aux anciens régimes asiatiques où les empereurs, entourés des plus grands généraux du pays, étaient principalement des commandants suprêmes des armées ce qui rend ce monde fictif comparable. Bon, Uta ce n'est pas Kingdom non plus alors ne vous attendez pas à des stratèges hors pairs ... en fait, il n'y a aucune stratégie. Ici, c'est à l'ancienne, la bonne, la dure, on décide quoi faire et on fonce dans le tas en rentrant par la grande porte!

Le désintéressement des empereurs pour la sécurité de leur population est bien représenté tout comme les massacres et les pillages des villages couramment exercé à l'époque féodale japonaise ou au cours des guerres chinoises de l'Antiquité. Cela se résume à arriver sur place et à massacrer les habitants ... bah parce que c'est comme ça et puis c'est tout. Cela illustre bien la dangerosité de l'obéissance aveugle que peuvent avoir les soldats dans l'exécution de leurs ordres.

Le personnage de Benawi, que j'ai bien aimé (au passage), nous fait la morale que bien qu'un peuple ne soit rien sans son roi, le roi n'est rien non plus sans son peuple et que ce chef ne vit que pour lui assurer un bon gouvernement et surtout, dans ce monde constamment en conflit, la sécurité intérieure. Il y a un peu de philosophie politique dans tout ça et cela a été un des points pour lesquels j'ai bien aimé la série. J'ai toujours été fasciné par les histoires qui mettent en scène la façon de gouverner. Ici, rien de bien compliqué comme je l'ai expliqué. Ne vous attendez pas à un anime abordant la politique mais une touche légère n'est pas négligeable.

Passons à un sujet un peu fâcheux maintenant sur lequel j'admet que je sois contestable mais bon je pense ce que je veux. Liberté d'opinion!

Le principal souci de cet anime résiderait dans l'absence de difficultés réelles que rencontrent les personnages. Tous les obstacles qu'ils ont rencontrés ne m'ont pas paru difficilement surmontables, tout était plus ou moins assez vite écarté et cela apportait plus tard dans la série des incohérences. Ce ne sont pas par contre des incohérences scénaristiques mais de l'ordre de la logique comparative.

Pour premier exemple, les soldats impériaux qu'affrontent les protagonistes au début de la série sont assez facilement battus par des villageois qui a priori ne sont pas entraînés à l'art des armes. Ok, c'est bien la révolte du peuple pour la bonne cause mais entre les fourches, marteaux et autres ustensiles de fermiers et vieillards contre des jeunes soldats entraînés et armés ... euh c'est un peu déséquilibré non? M'enfin juste un peu, juste un peu ...

Ensuite, quand Hakuoro et les autres se trouvent du côté impérial, ces mêmes soldats sont nettement plus forts et résistent à d'autres armées étrangères. Soit les soldats étrangers sont aussi nuls soit on a fait un nettoyage général dans les rangs de l'armée. Pourtant, je le répète, des paysans les avaient précédemment battus (si ce n'est pas pour dire défoncés). C'est génial, mais oui ça tombe sous le sens!

Un deuxième exemple tiendrait à la loyauté que je juge trop "facile" chez des anciens vaincus, soit des personnages du camp ennemi prêtent un serment infaillible de fidélité à ceux qui les ont vaincus, enfin à Hakuoro bien sûr. Il y a dans ce dernier cas aucune réticence de ces personnages et cela me semble trop simple. On efface les mauvais souvenirs et on recommence autrement, on ne se prend pas la tête ici. C'est la reconversion. J'admets par contre que deux personnages m'ont paru un peu plus légitimes car on pourrait dire que pèsent sur eux une sorte de dette. Ce point reste plus cohérent tout de même.

Et au final dans tout ça ?

Pour en venir au bout, tous les éléments de l'intrigue se réunissent à la fin et ce de manière découpée, cela veut dire que des éléments sont donnés bout à bout dans plusieurs épisodes et c'est au spectateur de reconstituer le puzzle. Ce n'est pas incompréhensible, loin de là mais cela manque un peu de clarté pour expliquer le passé de Hakuoro. Pour tout vous dire, j'ai consulté un site qui reprenait bien chronologiquement tous les éléments afin de comprendre certains qui m'avaient échappés. Je ne devais pas être très attentif au cours des derniers épisodes parce que finalement cela reste bien abordable donc pas de panique.

La fin me laisse un assez mauvais avis. Elle est très différente de ce que nous avions pu voir précédemment dans la série. Habitué à un type d'univers dont les codes ont été assimilés au fur et à mesure, je ne m'attendais pas à ce genre de retournement. Cela m'a fait un effet de surprise et c'est pour ça que j'insiste que tous le monde ne sera pas du même avis que moi. Soit on encaisse la fin soit on n'encaisse pas, c'est très subjectif.

Conclusion :

Utawarerumono a pour moi de nombreux défauts mais reste une série que j'ai apprécié. Elle se regarde très bien si on adhère. Une fois passés les 4-5 premiers épisodes, je trouve que ça devient difficile de décrocher. Sur l'analyse, je suis assez négatif alors que pourtant j'ai aimé. Faisant alors la balance entre les deux, je fixe ma note à 6/10. À partir de là, regarder Itsuwari no Kamen s'offre à nous dans la suite chronologique.