Avant propos: Je tiens de suite à justifier la longueur de la critique et la note maximale. Bon, la critique est certes un peu longuette, et la note maximale un peu exagéré, mais je tiens à rassurer d'emblée les lecteurs qui peuvent trouver tout cela étrange à propos d'un anime qui leur est inconnu (du moins je le suppose, parce que si BA a été connu, ce n'est guère plus le cas maintenant): tout cela a sa justification, je l'espère convaincante.
Allez, ne perdez pas courage, on se retrouve en bas ! ;)
Introduction: Je dois dire que je suis assez déçu.
Voila, j’ai fait une accroche choc à ma critique. Maintenant, vous êtes pris dans les rets d’un suspens insoutenable, vous n’avez plus le choix, il faudra me lire, jusqu’au bout, pour comprendre ce que je veux dire par là. Mais de telles pratiques marketing sont indignes de la pureté de cœur qui sied à ceux qui ont dévoué leur vie à trouver le graal de la Japanimation, je vais donc vous dire tout de suite ce dont il retourne. Je ne voulais pas du tout dire par là que j’étais déçu de l’anime, ça il vous faudra effectivement me lire jusqu’au bout pour le savoir, mais tout simplement que j’étais assez déçu du peu de critique qu’a recueilli jusque-là cet anime. C’est d’ailleurs ce qui m’a motivé à sortir de ma flemmeur (mélange de flemme et de torpeur bien connu des membres d’AK ) légendaire pour poster ici. Là encore, pas à cause de la qualité intrinsèque de l’anime, mais tout simplement parce que cet anime a vraiment été, dans mon souvenir, assez connu à une époque (celle de sa parution d’ailleurs, aussi invraisemblable que ça peut paraître ;) ). Peut-être parce qu’il a été produit par Gonzo, et que gonzo a toujours eu le chic pour dépenser plus en marketing et en communication que dans leur animes proprement dit ? Ou parce qu’il a été l’un des premiers anime de mechas (ou, plus précisément, avec des méchas dedans) à intégrer des combats intégralement et exclusivement en 3D ?
Bon, bref, quoiqu’il en soit, à mes yeux en tous cas, cet anime avait une certaine réputation, et c’est ce qui m’a poussé à le voir, il y a de cela un an, à peu près. Il fait une critique sur un anime qu’il a vu il y a des siècles, il ne manque pas d’air, entends-je murmurer (voire carrément hurler à plein poumons pour les plus téméraires du rang du fond) dans la salle. Mais rassurez-vous, chers lecteurs, je vais tout de suite plaider avec une éloquence éblouissante ma cause. J’avais donc des attentes assez hautes quant à cet anime, compte tenu de sa notoriété, et je dois dire qu’après l’avoir visionné, je suis resté sur le sentiment d’une déception. Je vous le dis tout net, là, tout à trac. Pourtant, ce sentiment ne me satisfaisait pas, parce qu’en même temps, je n’arrivais pas à déterminé si c’était simplement mes attentes qui étaient beaucoup trop élevées (de la même manière qu’on n’attend pas d’un Gundam qu’il soit un anime d’une originalité conceptuelle éblouissante. Et ceux qui disent « si ! » ont certes une loyauté à la franchise admirable, mais je n’en dirais pas autant de leur compréhension de la Japanime), ou l’anime qui était effectivement surestimé. Il était certes évident que je n’avais pas eu affaire à l’anime du siècle, mais que pour autant, Burst Angel n’était pas foncièrement médiocre, en d’autres termes, il était pour moi plus ou moins moyen. Mais précisément, ce plus ou moins ne voulait pas dire grand-chose en matière de jugement: il est évident que si un anime est moyen à tendance inférieure à la moyenne, vous ne perdrez pas votre temps à le regarder, tandis qu’un anime certes pas exceptionnel, mais moyen dans la tranche haute pourrait légitimement retenir votre attention et être un divertissement agréable. Cet anime, je me suis donc astreint à le re-regarder récemment en grande partie, avec la ferme résolution de me faire une idée plus précise et de mener une réflexion de fond sur sa qualité (et vous admirerez au passage la dévotion que j’apporte à ces critiques, non, mais.)
PREMIER PITCH ET FAUX ESPOIRS
Le scénario « officiel » de l’anime fait état d’un jeune pâtissier, Kyohei, qui rejoint un groupe d’agent secrets pour une mystérieuse organisation, dans un Tôkyô cyber-punk où sévissent des mechas. Première description alléchante qui laissait augurer un anime très original, mélange de J-Pan et de Ghost in the Shell, où un chef pâtissier courageux et opiniâtre allait lutter au péril de sa vie pour préserver une oasis de douceur culinaire dans la grisaille de ce monde steam-punk. Je m’imaginais déjà de superbes combats de mécha à base de lancers de tartes aux fruits et de crème chantilly, l’avenir du monde décidé par un concours de babas au rhum… Malheureusement, de tels espoirs furent très vite déçus. A mon plus grand regret, rien d’aussi résolument audacieux, le scénario proposé dans la réalité est en fait bien plus classique (mais peut-être, penserons certains, n’est-ce pas un mal. Pourtant, j’aimais bien les babas au rhum, moi).
TREVE DE PLAISANTERIES
En effet, le personnage de Kyohei n’est en fait qu’un prétexte pour nous faire découvrir un trio de filles membres d’une organisations mafieuse philanthropique (ne cherchez pas à comprendre) possédant un Mecha. Trio qui est plutôt un quatuor, si on compte la très jeune informaticienne du groupe, qui est cependant sensiblement plus en retrait. Je dis « trio de jeunes femmes », connaissant les codes de Japanime comme vous les connaissez, vous pouvez envisager que l’un des thèmes de l’anime est le concept que l’on pourrait résumer en français par « trio de charme et de choc ». Et, en effet, le producteur de la série a avoué lui-même avoir conçu l’anime comme un anime de « Girls and Gun’s », croisement improbable entre western spaghetti et tomb raider. Et il vous suffit d’aller voir les images des trois jeunes femmes en question (la chef, Sei, et les acolytes Jo et Megumi), pour comprendre que ce critère de Gun’s and Girls (que j’estime vraiment bien traduit par choc et charme, décidemment, je suis fier de moi) a été pris très au sérieux, c’est-à-dire à coup de tenues improbables et affriolantes et autres chara design ecchi. Mais rassurez-vous, Burst Angel, c’est loin de n’être que ça. En fait, on le verra plus tard, mais c’est finalement un aspect assez mineur de l’œuvre, rassurez-vous (même si, je l’avoue, on peut avoir des doutes légitimes quant à la qualité de l’anime en voyant ça).
L'UNIVERS, ENTRE REUSSITES INDENIABLES ET FAIBLESSES MALHEUREUSES
Et puisque Burst Angel (BA) ne se limite pas aux poitrines plantureuses de ses héroines, commençons immédiatement par l’analyse de l’univers. Le cadre est un cadre steampunk futuriste classique, rien de très original là-dedans : Grandes villes où règne la violence des gangs, la corruption des grandes entreprises, la pollution et le smog, dans une sorte de néo-far-west, mais quand même assez soft. Loin de la violence à outrance d’un Mad Max par exemple, ou de la précision et de la complexité d’un Ghost in the Shell, BA propose un univers steampunk de facture classique, banale et lisse. Ne vous attendez donc pas, malgré les promesses de certains résumés, à une aventure inoubliable dans un monde saisissant. Pour autant, ne nous acharnons pas sur l’univers de BA, qui s’il ne brille pas par son originalité, est tout de même de bonne facture. En fait, BA se débrouille vraiment de façon tout-à-fait honorable dans la mise en scène de cet univers, même si le fond reste peu novateur. BA navigue en effet globalement bien entre les trois grands écueils du worldbuilding dans la Japanime. Le nombre d’œuvres, qui peuvent par ailleurs être de qualité, qui se brisent lamentablement sur la cohérence et la pertinence de l’univers étant, dans la Japanime, proprement impressionnant, BA mérite sur ce point d’être salué. L’univers est cohérent, intéressant, et bien intégré ; cela peut sembler le minimum minimorum pour tout anime, mais cela est suffisamment rarement réalisé dans la réalité pour qu’on reconnaisse cela comme une qualité propre à BA. Qualité qui n’a rien d’exceptionnelle en elle-même, mais qui n’en reste pas moins vraiment appréciable.
Premièrement, l’univers est persistant. C’est l’une des bases de notre vision même du monde, les images doivent persister un certain temps sur notre rétine afin d’être analysées par le cerveau (du moins si mes souvenirs de mes lointains cours de biologie au lycée sont vrais). Malheureusement, on ne compte plus les animes qui ont pourtant une bonne idée d’univers, mais qui disparait mystérieusement quelque part entre l’épisode 10 et l’épisode 11. Par exemple, prenons Chrno Crusade, qui est prend le pari de se dérouler dans les années 20, cadre a priori intéressant, sauf qu’après trois épisodes, on fait complétement abstraction du cadre temporel. Là, il n’en est rien, l’univers est développé de façon homogène tout au long de l’histoire.
A l’inverse, l’anime ne tourne pas exclusivement autour de la description de l’univers steam punk, sans aucun égard pour le scénario en lui-même, et l’évolution des relations interpersonnelles entre personnages.
C’est le second écueil évité, l’univers est bien intégré à l’histoire. Le scénario prend place dans un cadre défini, et se développe de concert avec celui-ci : beaucoup d’anime sont si fiers de leur cadre d’action qu’ils décident d’en faire leur principal élément de narration. On se retrouve alors avec des descriptions très complètes de l’univers, mais parallèlement avec une nécessité de faire avancer l’action. En général, il en résulte une cacophonie affreuse, une confusion brouillonne et décevante, ceux qui ont vu Ergo proxy, ou Appleseed verront sans doute de quoi je parle. Mais BA, fort heureusement, ne se risque pas à mettre son univers steampunk trop en avant (surtout qu’il n’a rien de très original), et s’en sert, avec mesure, comme d’une vraie toile de fond.
Enfin, dernier point, l’univers est compréhensible. C’est-à-dire qu’il est développé de façon continue et cohérente tout le long des épisodes : les bases du cadre d’action ne se modifient pas du jour au lendemain, elle sont révélées progressivement. Pour exemplifier la chose, contrairement à de nombreux animes, en général d’inspiration religieuse chrétienne revisitée (qui laisse songeur), pour en citer un récent, Kuroshitsuji par exemple, on ne se retrouve pas avec une avalanche de nouvelles informations quant aux règles fondamentales de l’univers concentrées en trois épisodes. Ou, à l’inverse d’un certain nombre d’anime de cadre SF similaire, on ne découvre pas soudainement, au détour de l’épisode n, une information absolument capitale que n’importe quel quidam dans la rue est censé savoir (du genre « eh, au fait, on est en guerre depuis 30 ans avec un empire surpuissant, mais j’ai attendu l’épisode 14 pour te le dire »). Je ne dis pas que des pans entiers de l’univers ne se révèlent pas de manière un peu précipitée dans les derniers épisodes, comme si les scénaristes avaient un peu flemmardé et avaient peur de ne pas rendre leur copie à temps et je ne dis pas non plus que ,parfois, on assiste pas à des cas flagrant d’oubli d’univers (notamment, les épisodes sur « L’esprit d’Osaka », je veux bien louer l’humour et la culture d’Osaka, mais en plein univers steampunk post apocalyptique, ça fait tache.) Mais cela est symptomatique de toute la Japanime, ne faisons pas à BA un mauvais procès. Non, BA s’en sort honnêtement bien, les différents rouages du monde de BA s’insèrent progressivement et presque naturellement les uns dans les autres, notre connaissance du background s’enrichit (sur la politique, les gangs etc..), mais de manière assez fluide.
GRAPHISMES ET AUTRE BANDE SON: PETITE PAUSE
Voila, tout est dit, après cette partie un peu dense sur l’univers, banal sur le fond, mais vraiment bien mis en scène, je pense que tout le monde, surtout moi, a bien besoin d’une petite pause avant de passer à l’histoire. Et donc, analysons un peu les graphismes, travail simple mais toujours gratifiant.
On passera d’abord sur le chara-design ecchi résolument too much de certains des personnages féminins. Comme je l’avais dit dans l’introduction, il faut se rassurer, finalement, la tonalité ecchi est peu présente dans le reste de l’anime –enfin, pas plus que dans tous les autres animes, fan service oblige. Connaissant Gonzo, on peut dire qu’on a échappé au pire (oui, je troll sur Gonzo, une veille habitude. Mais vu ce qu’ils font à la Japanime, ils l’ont bien cherché ;) ).
Graphiquement, BA est indubitablement, particulièrement pour un anime de 2004, une production haut de gamme. Là encore, on doit distinguer deux choses : la qualité graphique en tant que telle, et sa mise en scène. Techniquement, BA a bénéficié d’une grande attention, avec l’intégration de GC dans la plupart des environnements, et notamment dans le cadre des combats de méchas/autres véhicules. Certes, la CG de 2004 a pu vieillir, mais en toute honnêteté, la qualité graphique reste incontestable. L’intégration de ces graphismes en 3D est elle aussi réussie (on peut se rappeler de productions où la 3D abondante était malheureusement très mal intégrée). Elle ne détonne pas dans les environnements où elle s’insère, et se marie bien avec les personnages 2D (ce qui est toujours un défi), un peu comme dans les ghost in the shell –des modèles du genre. Choses également surprenante, au vu de l’ambition affichée d’un anime d’action, on note le réalisme de l’animation, surtout lors des combats. Bon, je n’aime guère parler des combats dans mes critiques, car, vraiment, ça fait trop shônen-boy - ;) – mais il faut bien mentionner ce point. On appréciera donc une animation fluide et loin des délires habituels auxquels se livrent les équipes de créateurs dès qu’on leur parle en général de mechas, combats sobres donc, relativement peu nombreux, d’autant plus appréciables que non, on a pas un combat de mécha au coin de chaque rue. Contrairement à un certain nombre de shônen et à ce qu’on aurait pu croire, ni les combats mettant en scène les silhouettes de rêves de nos héroines, ni ceux entres grosses machines viriles (désolé de résumer un peu primairement les deux types d’affrontement de la Japanime en général), ne sont si fréquent, et surtout, ils ne sont jamais livrés sans raisons. Ils servent toujours, ou presque, un propos, font avancer l’histoire, se justifient…
Là, j’aurais eu une transition toute trouvée avec ma partie trois sur l’histoire, mais je dois encore parler de la bande-son, je dois donc prendre mon mal en patience.
L’OST donc, est… Original (ça tombe bien, son nom l’indique), il a ce mérite. Je ne prétendrais pas qu’il est bon. Ce n’est pas non plus de la soupe sonore, ou du moins, si c’en est (chacun est juge), ce n’est pas la même que tout le monde. Bon, soyons honnêtes, l’opening par exemple, mi-anglais mi-Japonais (et anglais avec l’accent Japonais, s’il-vous-plait), est totalement incompréhensible. Mais moi, j’ai accroché. Au moins, c’était assez audacieux, comme tentative, et j’aimais bien le rythme. Dans l’ensemble, j’ai apprécié dans son ensemble la bande-son, que j’ai trouvé entrainante et bien adaptée aux situations. D’un autre coté, on me dit souvent que j’ai des goûts pour le moins douteux en matière de J-pop et de J-rock –et c’est formulé dans des termes plus vigoureux et plus imagés, croyez-le bien –donc je préfère arrêter là cette partie subjective de mon analyse. Par contre on regrettera cette pratique inspirée du jeu vidéo, de souvent lancer la même musique pour le même type d’évènements (irruption d’un monstre, tadaa, la piste numéro 28 s’enclenche) : soit c’est prendre le spectateur pour un idiot et lui mâcher le travail, soit c’est pour des raisons d’économies du budget musical. Eitherway, le rendu n’est pas forcément des plus efficaces.
HISTOIRE : FAIBLESSES ATTENDUES MAIS SUCCES INATTENDUS.
Alors là, parler de l’histoire, du scénario, du plot, ou tout autre synonyme qui a l’heur de vous plaire, c’est un peu une gageure, parce qu’il y a effectivement beaucoup de points à aborder. On va donc essayer de faire simple, en segmentant un peu artificiellement, je l’avoue, la chose en trois parties. Artificiellement, mais pas tant que ça. Ce n’est pas une distinction que je me plaît à utiliser fréquemment en fait de prisme conceptuel (mais de quelle distinction parle-t-il, il devient sénile, il n’a jamais parlé de ça… Patience, vous comprendrez en lisant, et vous vous direz, « ah mais oui,mais c’est bien sûr ! »)
Du rythme, du talent, une mise en scène réussie
Tout d’abord, évoquons un peu de la même manière que pour l’univers, ce premier point qu’est la mise en scène du scénario, ie sa capacité à traiter ou non une progression dynamique de manière complète. Sur ce point, Burst Angel s’en sort très bien. Je ne fais qu’un peu reprendre un point que j’ai déjà développé plus haut, mais, résolument, cet anime a le sens du rythme. Grâce à une narration bien construite, BA se paie le luxe d’apparaitre comme un tout cohérent et même presqu’homogène, ce qui, quand on jette un regard sur les productions, même à succès, actuelles, est loin d’être gagné. On ne compte plus les animes qui, à un degré plus ou moins marqué, certes, omettent tout simplement des pans entiers du scénario qu’ils proposent, par manque de temps, fatigue des développeurs, ou manque de lucidité des types chargés du synopsis. Vous savez, ce personnage introduit dès le début mais qui reste dans l’ombre pendant tout l’anime, parce qu’on ne s’est jamais donné la peine de s’intéresser à lui. Ou ce moment où, vers la fin, vous constatez que les 20 premiers épisodes n’avaient effectivement rien à voir avec l’intrigue principale (phénomène également nommé « Syndrôme Ah my Goddess ! ». Je m’empresse de préciser que, personnellement, j’adore AH my Goddess !, quand on est un vrai fanboy, on fait fi de tout ça). Ou cet univers très bien mis en place pendant au moins une quinzaine d’épisode, mais qui ne semble manifestement graviter qu’autour d’un seul champ, en général militaire, et où on a jamais entendu parler de problématiques pourtant assez évidentes, à tout hasard, l’économie ? La politique ? Ou encore… Bon, je pourrai continuer longtemps à lister les pires défauts scénaristiques de la Japanime, mais ce que je souhaitais montrer, c’était combien les histoires complètes, c’est-à-dire qui s’arrangent pour se déployer dans toutes les directions, ou au moins suffisamment pour ne jamais procurer une impression de manque ou d’incomplétude, sont rares. Souvent, on a affaire à une focalisation presque obsessionnelle sur un point qui éclipse du coup tout le reste. Ou à l’inverse, comme dans le cas de l’histoire qui commence à l’épisode 20, d’un manque de concentration tout aussi dommageable.
Maintenant, BA parvient-il à éviter tout cela ? Bien sûr que non, mais je serais tenté de dire, presque. Il y a une intrigue principale, qui sans devenir aussi grosse qu’un cable d’hélitreuyage (je crois avoir employé à peu près la même métaphore vaseuse dans une autre critique que j’ai faite. Non, vous voyez, je ne deviens pas sénile !), c’est-à-dire, sans imposer une progression ultra-linéaire pendant 280 minutes, arrive assumer son rôle de fil rouge (à travers, notamment, l’apparition de manifestations « étranges », dans la ville). Oui, les premiers épisodes font sens au regard des derniers (luxe suprêmement rare), et on a pas l’impression d’être totalement perdu, laissés à la merci de l’imagination du moment des scénaristes.
Et dans le même temps, puisqu’on n’a pas affaire à une intrigue trop linéaire et écrasante, on appréciera également le traitement du background des personnages –qui souvent répond à une necessité de l’intrigue elle-même, deux en un –ainsi que du background en général. Au final, ce savant mélange se regarde très bien (ça aurait pu ne pas être le cas), ce qui n’est pas sans rappeler une très célèbre série des studios Bones… Certes, on pourra dire que Cowboy Bebop parvient cet incroyable tour de force, de proposer un tout cohérent, complet et dynamique en terme de mise en scène, avec plus d’élégance. Et naturellement, c’est exact, mais BA s’en sort à son niveau tout à fait honorablement. On appréciera d’ailleurs que la structure en arc rigide de Cowboy Bebop –avec arcs centrés sur l’histoire et arcs totalement déconnectés, reprise ensuite par les séries Ghost in the Shell- n’ait pas été reprise, contrairement à la mode qui régnait à cette époque–un peu moins maintenant. Avec ses arcs plus souples, BA a essayé d’inventer sa propre efficacité narrative, et on les en remercie.
Il est temps d'assouvir mes instincts sanguinaires...
Part 1 : Be bad!...
Après avoir parlé de qualités, il est temps de se montrer sans pitié pour les défauts de BA. « Oui, sans pitié, Miaoussssss ». Donc, je le dis comme ça, tout à trac, BA reprend pas mal de clichés. Par ‘pas mal’, il faut entendre plus que le nombre autorisé pour qualifier une œuvre d’originale. Il n’y a pas du tout contradiction avec ce que j’ai dit plus haut, c’est-à-dire que le déploiement de l’histoire soit très complet et très rythmé, et que je me permette même d’oser le parallèle avec Cowboy Bebop qui a fait hurlé (j’ai très bien entendu, ne faites pas les innocents) les puristes. Simplement, si on veut reprendre une distinction simpliste, là je m’intéresse au fond de l’histoire et non plus à la forme. IL y a donc un certain nombre de ressorts scénaristiques qui sont empruntés aux classiques de la Japanime (sans vouloir trop spoiler, disons juste que des inspirations classique à la battle royale, peuvent être pompées de façon assez lourdes, surtout à un certain moment). Je ne dis pas que ce sont des clichés vraiment affreux, mais un peu à la manière des Gundam, ce sont des « trucs » qu’on est guère surpris de retrouver. On s’insurge pas pour autant, mais on est toujours un peu déçu de retrouver des tropes de Shônen dans un anime qui avait si bien réussi sur d’autres plans.
Part2: ...But stay honest
On peut quand même nuancer cette dure critique malgré tout, et au moins sur deux plans. D’abord, certes il y a des clichés scénaristiques, mais la mise en scène permet précisément de sauver les meubles (on pourra se rappeler avec profit d’un certain Full Metal Panic! qui pouvait accumuler certains clichés scénaristiques, comme le bahamut-like… mais que le génie de la mise en scène permettait de pardonner sans réserve). Au moins, on échappe à cette situation terrible qui est celle d’un anime où on va nous présenter ce qui est un archétype scénaristiques avec quelques nuances cosmétiques comme un pivot de toute l’histoire. Parfois, ça arrive, on découvre que effectivement, les scénaristes veulent faire passer ce ressort classique comme une idée de génie (on se demande quand même à quoi a du ressembler la réunion préliminaire quand même. « Oh, attendez, les amis, j’ai eu une idée de génie : pourquoi on ne ferait pas ce que tout le monde a fait plein de fois ? »). Grâce à son dynamisme scénaristique, on est sauvé, même quand on a une, il faut bien le dire, mauvaise idée archétypale, on en est très vite débarrassé. D’autant que BA arrive également à aborder des thèmes très divers –tout en gardant un fil rouge –ce qui fait qu’on va parfois voir arriver des tropes, mais issus d’un autre genre. Par exemple, propres à l’animation d’horreur, lors d’un court arc dans un pensionnat de jeunes filles. Ce qui est, à défaut d’être original, au moins rafraichissant. Dans un sens, BA est aussi un melting pot assez réussi de différents genre, Horreur en huis clos pour un certain acte, un peu de « demon hunting », du cyber-punk traditionnel, du mécha… Si séparément, ces thèmes ne sont pas vraiment traités d’une façon originale, la façon dont ils parviennent à cohabiter, est elle, vraiment audacieuse.
Le second point, est que BA arrive également à développer des éléments vraiment originaux. Notamment dans sa prise en considération de l’aspect politico-économique, et plus généralement des luttes de pouvoir, qui sont un aspect malheureusement presque systématiquement escamoté de tout le genre ET cyber-punk ET mécha (et girls and gun’s, je ne sais pas, vu que je crois qu’ils ont inventé le genre pour l’occasion ;) ) –ou alors traité d’une façon tellement ridicule qu’on aurait aimé que ça soit EFFECTIVEMENT escamoté. Je ne ferais pas de paralléle avec ghost in the shell, qui est quasiment l’un des seuls à avoir rétabli le réalisme économique dans le cyber punk, mais c’est comme-si. Même si, là, BA est quand même nettement moins subtil.
LE POINT FORT QUI FAIT LES GRANDS: La justesse (et bonne chance pour comprendre ce que je veux dire rien qu'avec ce titre vaseux)
Je palabre, je palabre, mais je n’ai toujours pas abordé en fait LE point le plus important. Vous savez, le point qui arrive toujours à la fin d’une critique de six pages particulièrement verbeuse, et qui est absolument essentiel, à tel point que c’est ce que l’auteur avait voulu dire en premier depuis les heures qu’il écrit. Ce point-là, exactement, vous y êtes.
Ce point-là va donc parler du grand atout de BA, d’un atout qui rend vraiment cette série unique, malgré ses indubitables défauts. Jusque-là, ce n’est rien de plus qu’une série bien réalisée, aux graphismes léchés, mais avec un scénario trop typique pour être vraiment intéressant, sauvé par la mise en scène (« mais pourquoi il ne l’a pas dit comme ça directement, au lieu de passer des pages entières pour aboutir à ça ? » Mais PARCE QUE. Non mais.). Mais, cet atout mystère fait tout basculer. Trêve de suspens facile, je vais, après un bon paragraphe passé à tourner autour du pot, vous le dévoiler de suite, tadaa…
BA est un anime d’une très haute qualité quant aux relations interpersonnelles entre les protagonistes. Comme je l’ai dit, c’est un fait très rare dans la Japanime, mais les relations humaines qui unissent les membres du groupe (rappelez-vous, les trois filles de choc et le pâtissier) sont d’une rare mesure, et partant d’un rare intérêt. Vous pouvez peut-être croire que ce terme, « relations interpersonnelles etc… » est une tournure que je suis contraint d’employer pour ne pas spoiler, mais qui recouvre en fait un diagramme complexe d’interconnection entre tous les personnages de la série, à la school rumble, ou en plus sérieux, à la Code Geass (ou encore, au Feux de l’Amour). Mais cela ne pourrait être plus éloigné de la réalité. En fait, j’entends par là une grande justesse dans les rapports individuels. C’est un point où, vraiment, on n’attendait pas du tout Burst Angel, et pourtant…
Pour expliciter mon propos, il semble assez évident que la Japanime, comme d’autres formes d’art d’ailleurs, aime beaucoup d’abord enfermer ses personnages dans des stéréotypes bien définis. Ca ne veut pas forcément dire que tous les personnages se ressemblent, mais qu’une fois que leurs caractéristiques ont été fixées en général dès le premier épisode, eh bien, presque tout le boulot est fait. Prenons une équipe, puisque c’est le cas de BA, on sait, par exemple, quel devra être le comportement en telle ou telle circonstance du pervers-au-grand-cœur, ou du trouillard-qui-se-révèle, du maître-légendaire-mais-trop-fatigué-pour-continuer-à-se-battre, de la jeune-fille-timide-mais-absolument-redoutable-sous-ses-dehors-doux, du dominateur-froid-mais-qui-se-bat-pour-le-bien-commun-finalement etc… On notera d’ailleurs cette tendance très récente de beaucoup d’anime de battre en brèche ces archétypes en détournant ET les clichés qui les sous-tendent, ET leur rigidité (Gurren Lagann, Katanagatari etc…) Deuxième point, l’affection toute particulière de la Japanime pour le pathos. Car il arrive que, entre ces individualités, des relations se nouent, et même évoluent. Et chaque étape de cette évolution est marquée par un pathos tonitruant, tout est surjoué. Si il y a une tension entre A et B, elle sera toujours à mort, et s’incarnera dans un combat grandiose –toujours un match nul. Si deux personnages se réconcilient, ça sera avec force de prise de conscience tragique, de pupilles virevoltantes, et de contemplation finalement paisible des étoiles côte à côte couchés dans un champ (désolé de vous avoir spoiler au moins la moitié de la Japanimation là).
C’est la raison pour laquelle des œuvres qui possèdent cette justesse dans la description des rapports humains, sont très rares (et pas seulement en Japanime), et sont de véritables chef d’œuvres de finesses et d’émotion authentique. Non, dans la réalité humaine qui est la nôtre, tout ne s’exprime pas aussi simplement. La souffrance humaine ontologique et individuelle ne s’exprime pas toujours en sentiments bien définis et clair, qui collent parfaitement avec une musique de fond. Ils ne s’expriment même pas forcément vraiment à travers les mots, comme le note Katow dans la condition humaine (il fallait à cette critique une référence classe, la voici ! Maintenant, je peux mourir en paix).
Quand on y regarde de plus près, les œuvres de la Japanime qui réussissent à serre la personne humaine au plus près, et non plus simplement le personnage, sont très rares. Pour retrouver cela, il faudra convoquer des œuvres majeures comme Cowboy Bebop –la complexité de la relation Faye-Spike, le non-dit et la confiance non formulée à bord du bebop – Lain, Bokuranon, ou encore Serei No Moribito, voire draker than black. Et BA, dans tout ça ? BA y arrive d’une manière qui n’a rien à envier à ces illustres productions. Prenons par exemple quelque chose que je ne peux pas spoiler, parce que ça apparait dès le premier –ou le second –épisode, la relation Meg-(umi) –Jo. Amitié, fidélité, loyauté, fraternité, reconnaissance, amour (homosexuel) ? . Relation qui se constitue d’abord au sein d’un groupe –le quatuor de choc –ou parfois contre ce groupe, toujours un peu exclusive ?
BA pose ces questions, sur l’une des relations qui aurait aisément sa place dans un de mes top 5 sur les plus belles relations de l’animation (pas très loin de Faye-Spike), avance des pistes, mais sans jamais y répondre, il respecte la fragilité de ces interrogations multiples, sans chercher jamais à les enserrer dans une évidence scénarisée. Quel est le rapport de la chef sur ce groupe ? Confiance, responsabilité, affection ? Comment peut-elle fluctuer ? Là encore, on est renvoyé à la mélodie pleine de finesse et de justesse que nous livre BA, mais sans jamais l’imposer de façon tonitruante.
Contradictions ?
Mais n’y a-t-il pas contradictions avec ce que je viens de dire plus haut ? Si l’intrigue n’est pas extrêmement originale, cela ne nuit-il pas à l’évolution des personnages, et à la complexité de leur développement ? C’est en effet curieux, parce qu’en général les rares œuvres qui réalisent ce second point réalise de concert le premier. Mais aussi dommage cette problématique d’originalité intrinsèque puisse-t-elle être, elle ne semble curieusement pas affecter la réussite de BA sur ce plan de mesure et de justesse. Parce que BA réussi déjà admirablement, et dans son genre, atteint déjà une forme d’achèvement. Il semblerait que l’intrigue, même si elle est classique dans une partie de ses ressorts, ne nuit pas au traitement des protagonistes. Un peu à la manière de Cowboy Bebop, chaque nouvel élément scénaristique met les protagonistes en face d’une réalité nouvelle, et tout l’intérêt de l’anime repose dans la réaction desdits protagonistes. Qu’une trahison semble apparaitre par exemple, ou qu’une grande menace pèse sur le groupe, ce sont là autant de confrontations à la réalité potentiellement objectivables, à la rigueur, sur ce plan, peu importe comment elles arrivent (c’est d’ailleurs le concept de Bokurano), même à travers des artifices classique de deus ex-machina (non, vous n’aurez pas droit à une deuxième référence classe à Euripyde, trop, ça ferait pédant^^).
CONCLUSION (tout court, restons sobres, pas de sous-titres)
Il est grand temps de conclure cette longue (non, pas plusieurs « o » à la suite, ce n’était pas siii long, quand même ? Si ? Et inutile ? Bouhouhou…) critique.
Je me permettrai un court résumé sur mon appréciation de la qualité de cette série. Première chose, Burst Angel remplit son contrat. BA a des défauts quand à son histoire, classique et un peu trop archétypale à certains égards, certes. Cela peut paraître normal a priori pour un anime de mechas à la base, mais ça n’en reste pas moins un point négatif. Et pourtant, grâce à sa narration extrêmement bien exécutée, qui peut rappeler celle de Cowboy Bebop, ainsi que l’originalité de certains de ses thèmes (dimension politico-économique), BA remonte largement la pente. Indubitablement, BA est un bon anime.
Mais sa vraie force réside surtout dans le traitement des relations humaines qu’il propose, tout en retenue, justesse, et finesse. Chose étrange, je le conçois, dans un anime de « Girl’s and Gun », où méchas, gunfight, tenues affriolante et ecchi (mais moins qu’on le croit) ont droit de cité.
Maintenant que tout est dit, qu’en conclure ? Bien sûr, il est dommage que AB n’ai pas su s’extraire de ses problèmes d’originalité, alors qu’il disposait d’un tel potentiel (« It’s over nine thousand », me hurle mon scouter. Oui, trop facile, je sais :( ). Maintenant, est-ce que cela doit constituer un défaut rhédibitoire ? Ma réponse est non. Tous les animes, y compris des animes très prestigieux, ont leur défauts. BA les compense par des qualités d’exécution et de thématiques tout-à-fait remarquables. Peut-on dire que BA est-un chef d’œuvre, alors ? Là, je crois que c’est plus compliqué. Malheureusement, non, je le crains. C’est sans doute triste que BA ait été produit par Gonzo –oui, je vous l’avais dit, je ne m’arrête pas en si bon chemin –entre d’autres mains, cet anime aurait peut-être atteint d’autres cieux. D’un autre côté, ça reste Gonzo qui a produit ce qui reste un très bon anime, donc prenons le d’un bloc, avec ses éclairs de génie et ses faiblesses, sans chercher à soupirer en vain après une version idéale et éthérée.
Je disais dans l’introduction que j’avais été déçu la première fois. Je pense que ce sentiment était en fait une erreur (mais vous avez attendu jusque-là pour le savoir, héhé), du au manque de concentration qui était le mien lors du visionnage –je recherchais un Gundam-like –et à mon Otakulture encore partielle. Je sais que BA ne jouit pas (plus) d’une grande notoriété actuellement. Pourquoi aller visionner un anime de 2004 parmi l’innombrable production qu’a charrié Gonzo (oui, encore !) de toute façon ? En re-regardant BA, j’ai eu une excellente surprise, ce genre de surprise très rare qu’on éprouve en ayant le sentiment de découvrir quelque chose. La dernière fois que j’ai ressenti ça, c’était en regardant Serei No Moribito –qui avait une bonne réputation critique, mais une faible notoriété publique. BA est, à sa manière, un chef d’œuvre ignoré. Plus précisément, c’est une perle ignorée, pas tout à fait un chef d’œuvre, parce qu’il manque de complétude dans sa beauté, mais une œuvre très belle, qui reste injustement méconnue. Peut-être l’anime qui, en ces temps de mainstream à outrance, peut redonner goût à l’otakulture. Non, le mainstream n’est pas forcément mauvais, juste dans 99% des cas, et au-delà des œuvres encensées par la critique (The house of five leaves, katanagatari… pour cette année par exemple), certes excellentes, il peut exister des productions mainstream digne d’intérêt.
C’est pour cela que je mets 10. Objectivement, BA ne méritait pas 10, si j’avais à le noter, en considérant ma sévérité de notation habituelle, j’aurais mis un 16 ou un 16,5 sur 20 (de toute façon, je milite contre les notations sur 10 seulement et sans virgules ici. Je finis par mettre 7 à tous les animes. Enfin, c’est une autre histoire…). Mais je veux, de façon tout à fait mégalomaniaque, essayer de faire partager cette expérience, et aussi ce message d’espoir, sur la beauté au cœur du mainstream. Dans le fond, si ce n’était le coté mainstream de certains aspects de son histoire, BA serait vraiment très proche de Cowboy Bebop. Ainsi donc, le mainstream n’est pas mort, BA le prouve, et gagnerait à être vu, et reconnu !
Sursum Gorda !