J'avoue qu'au début j'étais pas très emballé par le synopsis, une intrigue centrée sur un jeu de cartes, faut voir. Mais vu que j'aime pas trop le style, ça partait plutôt mal pour la série. Au départ je l'ai prise pour une de ces énièmes comédies parsemées de romance où il ne se passe jamais rien, et bah c'est presque ça. Quand tu vois le physique de l'héroïne c'est à se demander si les amourettes classiques du Shôjo vont pas primer dans l'histoire. La beauté fatale, qui n'a aucun défaut, et qui ne rend pas compte que le beau mec qu'elle côtoie tous les jours est amoureux d'elle, mais heureusement pour moi on évite le cliché (ou presque).
Dans Chihayafuru la priorité absolue, c'est de devenir le meilleur joueur de Karuta. Et là c'est déjà un bémol, le Karuta, le Karuta, le Karuta. Ils n'ont que le Karuta à la bouche, alors si dès le début on n'accroche pas le jeu autant arrêter tout de suite la série.
Autrement, je pense à truc qui m'a pas mal déstabilisé lors des premiers épisodes, les règles. Honnêtement ce n'est pas si facile que ça, le principe reste basique, mais si on n'a pas un minimum de connaissances dans la langue faut vraiment batailler pour arriver à suivre une simple partie. Et je ne parle même pas de la compréhension des poèmes.
Pour autant, quand on regarde de près un match de Karuta, on peut voir certains aspects du Shônen en ressortir. La détermination sans failles du héros toujours près à tout pour aider ses amis, les grands gestes sur les cartes qui ressemble à des invocations de monstres, sauf que la comparaison s'arrête là. L'auteur veut nous montrer qu'il prend son œuvre très au sérieux, et donc ne s'amuse pas à nous balancer des situations invraisemblables ou exagérées (enfin...), style One Pièce où tout est parfait. Le chemin sera long et dur pour atteindre le titre de Maître, et c'est ce qui fait le charme (pas unique) de Chihayafuru.
Comme on suit les personnages dans leur parcours, on a vraiment le sentiment qu'ils ont tous un minimum progressé, sans que ça aille trop vite. Où plutôt qu'on a l'impression de pas brûler les étapes, qu'on prend le temps de bien faire les choses. Un autre truc qu'est bien, c'est que rien n'est couru d'avance. En fait on nous montres tellement bien la confiance du personnage, que c'est à s'y méprendre. "Je vais gagner, j'en suis sûr" et d'un coup, retournement de situation, et là le stress montent en puissance, que c'est bon. Car il faut bien comprendre qu'on ne devient pas le meilleur en un claquement de doigt.
Et les personnages nous l'expriment de façon magistrale, plus particulièrement pour le cas de Taïchi. Pour expliquer un peu, la série est divisée en deux sortes d'arcs. Un qui décrit l'enfance (qui est très court) et l'autre la version adulte. De toute façon ça doit être dit, Taïchi enfant, était une petite merde. Un lâche qui fait des coups bas et qui ne les assumes pas, il semble inévitablement voué à être détesté. Puis il grandit, et la fleur de l'âge dévoile d'autres aspects de sa personnalité. Et c'est là qu'on se rend compte à quel point on a eu tort à son sujet. Il évolue de telle sorte qu'on est obligé de l'apprécier.
Déjà il faut savoir que Taïchi souffre d'une espèce de complexe d'infériorité vis-à-vis d'Arata. En gros il pense qu'il ne pourra jamais atteindre son niveau, et du coup ça le décourage. Et en dépit cette vision pessimiste des choses essaie toujours de faire de son mieux. Personnellement j'accorde beaucoup plus d'attentions à quelqu'un qui fait des efforts plutôt qu'à celui pour qui tout est facile. Parce que la volonté est là. Et ce malgré ça Taïchi lui n'y parvient pas. Quand on voit la peine qu'il affiche face à une défaite, comment tu veux ne pas le prendre d'empathie ?
Lui qui fait tout son possible pour se dépasser, lui qui m'a ému au point d'en pleurer, façon d'aborder les choses, il a fait un sacré bond dans mon estime.
Sinon concernant le protagoniste Arata, plutôt mitigé. Ce que je reprocherais en premier lieu à son personnage, c'est de faire des promesses qui ne seront tenues que, au mieux, dans la seconde saison. On nous promet des super-matchs entre lui et trucmuche qu'on n'a toujours pas eu, ça nous laisse juste la sensation que tout ce qui s'est passé jusqu'à présent n'a servi que d'introduction, histoire de faire durer le plaisir. Mais c'est pas uniquement ça, au départ on nous le présente comme un Dieu du Karuta, il nous en met plein la vue avec sa technique, sa maîtrise, si bien qu'on en veut plus de lui, plus de partie où il éclate ses adversaires. Le problème étant que son personnage est bien trop en retrait, parce que deux trois apparitions de temps en temps pour faire genre qu'il est bien là, et qu'on l'oublie pas, c'est loin d'être suffisant. Mine de rien j'ai beaucoup aimé Arata, et son manque de présence me révolte.
Au-delà de ça, et s'il y a bien une chose que j'ai trouvée un peu exagéré, c'est que les personnages croient trop au pouvoir de l'amitié. J'ai rien contre, mais une parcimonie serait la bienvenue. Étrangement ils n'ont pas l'air de piger que lorsqu'une personne fait un malaise dans un lieu public on l'emmène à l’hôpital... Non, eux leur préoccupation première c'est de jouer. Et c'est là que ça peut devenir vraiment irritant, si on se met à leur place on peut comprendre toute l'importance qu'ils accordent au Karuta. Sauf que des fois ils sont assez limites et agissent sans motivation autre que "je vais gagner parce que mes amis croient en moi" pas toujours très réaliste... Bon après c'est pas très dérangeant, mais c'est un peu bête de compter que là-dessus.
En revanche, pour compenser ça, on droit à tout un panel d'émotions efficaces et sans temps mort. J'ai ressenti quelques vagues intentions de véhiculer une espèce de joie vivre, dans toute cette bonne humeur qui se dégage de Chihayafuru. On nous réserve à pratiquement chaque fin d'épisode une sorte de morale, tellement empreinte de vérité qu'on en frissonne, le tout couplée avec une musique de fond qui masse avec douceur nos oreilles. On n’essayerait pas de nous éduquer ? Enfin bref, vite fait, on a aussi quelques sentiments, seulement rien de bien développé, alors ne pas s'attendre à quoi que soit de la part des personnages. J'avais entendu dire que la série n'avait pas marché au Japon, et c'est regrettable. Elle mérite bien mieux que ça.