Qu’il est dur d’entamer une critique sur un anime comme celui-ci ! Car qui dit critique, dit introduction, et là c’est le néant. Ce n’est probablement pas le terme le plus approprié, car il y à effectivement une histoire derrière Paranoïa Agent, mais elle est tellement chaotique que ça en devient presque de l’art abstrait, ou du courant surréaliste. D’où la difficulté de résumer l’histoire ou même d’écrire un synopsis.
Cette distorsion scénaristique se ressent directement : on passe ainsi d’un personnage à l’autre sans structure, les uns croisant les autres régulièrement. Le problème de cette absence de schéma cohérent, c’est qu’elle représente une arme à double tranchant : d’un coté c’est un tout simplement un chef d’œuvre, magnifique d’originalité et transcendant de philosophie, mais cela le fait aussi entrer directement dans la catégorie des œuvres imperméables au large public. Une autre conséquence est que même si l’on ne s’ennuie que rarement, il n’y à quasiment aucun suspense. On se demande évidemment pourquoi, comment, qui, etc … mais jamais au point de susciter l’envie de regarder l’épisode suivant de manière compulsive, comme le fera un Gantz par exemple.
Le scénario passe ainsi progressivement au second plan, basculant dans le monde du fantastique et de l’imaginaire, ajoutant encore plus de chaos à la distorsion ambiante.
Ce qui fait qu’on ne s’ennuie pas vraiment, c’est que chaque épisode retrace une tranche de la vie d’un personnage en particulier, avec comme généralisation principale d’être soumis à d’énormes pression par le monde dans lequel il/elle vit. Ainsi la série soulève un certain nombre de thèmes philosophiques, incitant celui qui la regarde à la réflexion, chacun des épisodes ouvrant de nouvelles portes. Au final on ne termine pas plus la série pour connaitre le sort d’un quelconque personnage que pour arriver au terme du raisonnement de l’auteur, inéluctable et sans compromis.
Assumant toute sa portée philosophique, Paranoïa Agent s’écarte complètement du cadre du simple divertissement, un peu comme on fait la différence entre du vaudeville et du Jean-Paul Sartre. On a ici affaire à un anime qui nécessite une implication du spectateur, pas simplement d’appuyer sur play.
Les situations sont décrites avec un humour noir particulièrement cynique, avec par exemple des suicidaires amateurs, ou des commères passionnées de morbide. Il n’est donc pas rare de sourire en regardant un épisode, même si on est loin du fou rire incontrôlable.
Les graphismes sont agréables, le chara design est beau dans l'ensemble, mais inégal entre les personnages, essayant de retranscrire visuellement leur psychologie propre.
L’animation est parfaite, les décors sont relativement soignés. Une impression générale de beau et de dérangeant à la fois, globalement à l’image de la série : paradoxale et fascinante.
Un autre point fort exploité ici à son potentiel maximum est sans conteste la bande sonore. On voit que chacune des pistes de l’OST a été travaillée pour accompagner à chaque instant l’image, instaurant le climat presque de manière mathématique.
Pour conclure sur un avis personnel, je dirais que j’ai beaucoup aimé cette série pour le dessin, sa bande son, les thèmes abordés et l’ambiance générale qui s’en dégage.
D’un autre coté je peux tout à fait comprendre qu’on puisse décrocher, notamment pour éviter la prise de tête. Paranoïa Agent n’en reste pas moins une expérience à vivre, et je me risquerais même à en conseiller le visionnage aux amateurs d’animes un peu tordus, comme moi.