Nom d’un chien, Porco Rosso a seize ans cette année. Seize ans !
Et ce n’est pas pour autant que le vieux cochon vieillit mal ; au contraire, il se porte encore très bien, pour notre plus grand plaisir, ou du moins, dans le cas présent, pour le miens.
Les Ghiblis sont généralement basés sur des schémas assez similaires, et très rapidement, on s’y retrouve sans jamais constater de similitudes trop frappantes. Porco Rosso n’est pas tout à fait un Ghibli comme les autres, dans le sens où le personnage principal est un ancien pilote militaire, bien usé par la vie et frappé de lassitude constante. Tel un ermite désabusé, il se replie sur sa petite île déserte, avec comme compagnons son avion, son transistor, ses clopes et sa picole. Un homme, un vrai.
On est donc très loin du parcours initiatique de l’adolescent(e) et de son contact privilégié avec notre mère à tous, la nature.
Ici, même si les paysages sont somptueux et parfois même touchants, Porco Rosso n’est pas franchement écolo. La nature fait office de décor, et ne provoque pas d’immenses raz de marée à chaque fois que Porco jette ses clopes et fout de l’essence dans l’eau.
Le scénario est donc basé sur la phase durant laquelle notre cochon préféré va changer de vie. Avec ses rencontres régulières face à un syndicat de pirates particulièrement stupides et obstinés, accompagnées d’un pilote hors-pair qui débarque des USA pour lui éclater sa tronche, sans parler de la petite fille de Piccolo, son réparateur préféré, qui vient perturber son activité hormonale, tous les éléments sont réunis pour faire un excellent film, où l’action ne cesse jamais vraiment, où l’environnement demeure perpétuellement divin, et où l’ambiance nous donne des ailes.
Visuellement, c’est une tuerie, encore aujourd’hui. Les séquences de bastons aériennes sont hallucinantes de réalisme et de dynamisme. Il en devient presque grisant de voir tous ses pilotes tournoyer dans tous les sens avec une aisance déconcertante. D’autant plus que les avions sont tous super stylés, que ce soit le petit chasseur du particulier, ou le gros molosse façon B-17 abritant tout un équipage de pirates du ciel.
Le character-design est par contre clairement identifiable, du pur Miyazaki. Mais franchement, qui s’en plaindrait ? Les expressions des personnages sont extrêmement riches, le burlesque est omniprésent et on se marre souvent rien qu’à voir la tronche de certains protagonistes.
Les décors sont à pleurer. Les immenses étendues d’océan, parsemées de quelques rayons de soleil traversant d’épais nuages, le tout accompagné d’un minuscule vaisseau rouge traçant sa route « vers l’infini et l’au-delà » forme l’équation magique faisant jubiler le spectateur avisé. Evidemment, par cela, j’entends celui qui sait reconnaître et apprécier les travaux du maître Miyazaki à leur juste valeur.
Musicalement, Joe Hisaishi a tout donné.
J’avais le souvenir d’un style assez identique à chaque film du studio, mais là je dois bien avouer m’être totalement planté : Porco Rosso ne ressemble à rien d’autre sur ce plan là.
Les morceaux sont pêchus, collent à merveille à l’atmosphère classieuse et élégante de l’adriatique, avec leurs consonances italiennes.
Les séquences humoristiques, qui au passage le sont vraiment, sont accompagnées de musiques de cirque, un peu comme on peut en entendre parfois dans Paprika, pour ceux à qui ça parle. Quoiqu’il en soit, le tout s’écoute très bien et fait office de deuxième peau au film, tant l’ensemble est synchrone.
Inutile d’en dire plus, et de toute manière, ce qu’il y avait, selon moi, à savoir a été dit. Porco Rosso est une tuerie qui fera rêver tous ceux pour qui l’aviation fut un fantasme d’enfance.
Tout en simplicité, le film nous fait parcourir un très agréable périple, dans un univers absolument ravissant d’esthétique et de légèreté.