La première chose qui frappe concernant ce one-shot de Kei Toume, auteur de Sing yesterday for me et Acony, c'est la magnificience des planches qu'il nous propose, en particulier le dessin de ses personnages. En effet, avec leurs regards mêlant douceur et tristesse, leurs demi-sourires pleins de sous-entendus, le tout auréolé d'une beauté éthérée, les protagonistes de ce récit nous sautent à la figure, comme un peu sortis de leur univers de papier. Les paysages ne sont pas en reste même s'ils se confinent dans un style épuré, sans fourmillements de détails, le tout seyant parfaitement à l'atmosphère gothique/fantastique de ce récit.
Visuellement, c'est beau, magnifique, orgasmique, au point de me faire oublier le scénario et me laisser contemplative tant sur les pages couleurs que noir et blanc. Bizarre quand on sait que l'histoire et la manière de la traiter sont pour moi des points primordiaux à toute analyse, passant avant le reste. Ici cela m'a cependant paru secondaire.
Cette impression fut certainement causée par le manque de dynamisme scénaristique que présente Luno.
En effet, si la première partie nous plonge avec plaisir dans l'histoire de Djita et ses grands yeux noirs, ça part un peu en déconfiture vers la moitié du volume où Toume nous dévoile les tenants et aboutissants de l'intrigue. On n'attend évidemment pas ça d'un format court et il est dommage que l'auteur se soit ainsi permis le luxe de quelques longueurs qui en définitive font perdre à son lecteur tout intérêt pour la suite, ou au mieux le plonge parfois en un certain ennui.
Mais n'exagérons pas, Toume nous sert quand même ici un récit qui, s'il est parfois trop conformiste, a l'avantage d'étayer la vision de l'auteur au sujet de la mort, l'éternité et le don de résurrection, même si j'aurais apprécié une fin un peu moins fade, et va au bout de sa thèse en un volume là où d'autres nous en auraient pondu 20 (suivez mon regard...).
Ainsi, si nous avons un jour la chance de voir ce one-shot édité en France (faut pas rêver), je me l'achèterais les yeux fermés, rien que pour les planches peut-être, mais aussi parce que l'auteur excelle dans le genre (voir Acony) et que ça vaut bien le coup de promouvoir ce genre de petits bijoux visuels plutôt que d'encenser une énième resucée de fanservice.
A découvrir, au moins histoire de savoir ce qu'est du vrai dessin.