X-Day est un petit bijou qui m'a vraiment pris par surprise. Je me suis mise il y a quelques jours à lire un peu tous les incontournables de Mizushiro Setona, séduite par son style et ses histoires. De toutes celles que j'ai lu, X-Day n'est pas l'oeuvre la plus marquante ni même celle que je retiendrais le plus et pour être tout à fait honnête, le résumé ne m’avait pas attiré plus que ça. Et pourtant, c'est de ce manga que j'avais envie de vous parler. Parce que X-Day, c'est court, mais intense, et que l'air de rien, je pense qu'on a beaucoup a en tirer.

Pourtant ce n'est pas un manga facile, et on y traite de thèmes assez durs. Chaque protagoniste a un passé lourd à porter, des secrets pas reluisants. Ce sont quatre écorchés vifs qui se retrouvent dans l'idée de faire exploser le lieu qui semble concentrer tous leurs problèmes: l'école.

X-Day, c'est avant tout la rencontre de quatre personnes isolées affectivement et qui doivent faire face à leur lot de mauvaise fortune et de coups durs sans que personne ne sache ce qui se cache derrière le masque de leur visage souriant. Tous ont en eux ce hurlement qu’ils ne parviennent plus à contenir et que personne n’entend. Leur quotidien n’est qu’une succession de jours sans saveur, qu’ils vivent en pilotage automatique.

Quatre personnes, qui, unies par une même volonté, vont apprendre à se connaître et à voir en chacune d'entre elles ce que personne n'aurait pu voir ou même deviner. Il me semble d'ailleurs que c'est quelque chose que l'on voit bien dans leur façon de s'appeler par leur pseudos: bien qu'ils découvrent très vite chacun leur identité, entre eux, ils n'emploieront jamais que leurs surnoms, connus d'eux seuls, comme s’ils formaient un groupe à part du monde, un havre de paix où ils peuvent être eux-mêmes – et c’est le cas.

Ce qui fait toute la force des mangas, ce sont bien ces quatre personnages, très forts et très attachants, leur caractère est bien dessiné, les liens qu'ils vont nouer entre eux sont très intenses. Malgré un format très court, Mizushiro Setona esquisse des profils bien définis, et ne reste jamais en surface des choses.

Mr Money, tout sourire, mais qui ne supporte pas qu'une femme l'approche ou le touche et qui cache ses blessures…

Polaris, le vilain petit canard de l'école que personne ne regarde ni n'écoute, écrasée, qui ne se sent jamais elle-même et pense trouver dans le suicide la solution qu'il lui faut…

11, l’héroïne, qui a perdu ce qui lui tenait le plus coeur: celui qui était son petit ami depuis trois ans et sa passion, et voit chaque jour son amie en jouir à sa place, tout en essayant de continuer à sourire.

Et Jangalian, le professeur de Physique-Chimie asocial et misanthrope, en proie à une pression constante dans son travail et au harcèlement d’une collègue.

X-Day est un message d’espoir et d’humanité. Dans ce projet fou, ce n’est pas la rédemption que nos quatre héros vont trouver, mais la solidarité : alors qu’ils étaient tous profondément esseulés, ils vont chacun trouver une écoute, quelqu’un qui les comprenne, ne les juge pas, et trouver un sens à leur vie, une utilité à leur existence.

Je trouve ce manga profondément touchant et juste. Et en même temps, si réaliste… je pense que le découvrir au lycée m’aurait beaucoup aidé, car je me suis aisément identifiée à Polaris et je pense que quel que soit notre lot d’épreuves, on ne peut que comprendre le malaise de ces personnages dans une société qui ne les comprend pas et qu’ils ne comprennent pas, dont ils se sentent exclus.

Quoiqu’il en soit, ce fut une belle rencontre, dont je suis ressortie vraiment bouleversée.

De plus, je suis complètement fan du trait de Setona Mizushiro (du moins, celui qu’elle acquit avec X-Day qui pour moi marque vraiment le tournant de sa carrière), et les dessins sont sublimes, il y a beaucoup d’émotion qu’on ne ressent qu’à travers eux et certaines scènes se passent entièrement de bulles.

Bref, au risque d’être un peu ridicule en disant cela, je pense que c’est un manga qui se vit et se ressent avant tout, et c’est difficile de parler de quelque chose qui nous transporte, mais je le recommande chaudement, je trouve que l’histoire est très mature, et qu’à l’image du petit groupe formé, c’est un petit havre de paix où se réfugier – tout n’y est pas rose, mais il en irradie un tel espoir qu’au bout du compte c’est comme une ode à la vie.

(Sinon je confirme que Le dernier souper, inclus dans le 2e tome, est une fable incroyablement touchante qui m'a complètement émue et qui vaut le coup d'être lue.)