Gosick: Gothic
Sur le papier Gosick partait gagnant.
Bones allait adapter un roman en vingt-quatre épisodes d’un anime qui reprendrait peu ou prou le pitch de Détective Conan: une gamine résout des enquêtes pour le compte des adultes, le tout dans une histoire rappelant Rapunzel, le conte de Grimm.
Gosick avait deux atouts à jouer: le cadre spatio-temporel, qui est l’Europe des années 1920. Avouez que ce n’est pas courant. Ensuite, l’anime pouvait miser sur une héroïne loli-tsundere aux jolis habits gothic-lolita. Bref, je ne voyais pas tout de suite ce qui pouvait faire échouer Gosick.
Et puis j’ai commencé à regarder.Et là, c’est le drame. Comme beaucoup, j’ai assisté impuissant à la lente agonie de cet anime, dont on peut conclure qu’il n'a pas brillé autant que souhaité.
Trois raisons expliquent cette déception: Gosick est mal écrit, mal interprété, mal situé.
Dès le premier épisode, on comprend que Gosick ne sera qu'incohérence, ennui et faiblesse. Dans une série, le premier épisode est celui dans lequel on expose les personnages, avant de commencer l'histoire proprement dite. Gosick choisit de bouleverser les choses et s'y prend très mal. Le premier arc commence tout de suite par une enquête sur un bateau. C'est là que l'on saisit à quel point les enquêtes de Gosick sont illogiques, et très mal racontées. On suit Kujo qui va de découvertes macabres en découvertes macabres, puis Victorique apparaît, elle sort la solution de l'énigme en claquant des doigts et tout le monde est content. La suite continue sur cette lancée avec un milieu de série d'un ennui mortel. Rares sont les séries dont je regardais les épisodes d'un seul œil, ou dont je passais les dialogues. Gosick en a fait partie. Les derniers épisodes rattrapent le désastre, mais je ne peux pas dire qu'ils méritent à eux seuls de regarder la série.
Mais le couperet tombe avec les personnages. «Agaçants» est un mot trop faible pour les qualifier. Le couple Victorique / Kujo ne fonctionne pas un seul instant, surtout à cause de ce dernier. Sérieusement, des personnages comme Kujo, je ne veux plus jamais en voir en japanime, jamais. Ce gamin vient d'un pays éloigné, il rencontre une blondasse dans un tour, et dès lors il ne fait que le suivre comme un toutou à sa maîtresse, hurlant «VICTORICAAAA!!!!» au moindre pépin. Ce genre de personnage, qui est à la fois le protagoniste et le faire-valoir de Victorique, est le cancer de la série. On ne peut pas s'identifier à un personnage aussi nul, et on regarde son duo avec Victorique d'un œil désabusé, tant les dialogues sont à sens unique. On voit tout de suite qu'en bon faire-valoir, Kujo est soumis au caractère fort de la tsundere, et ce manque d'équilibre entre les deux rend le tout indigeste (exactement comme dans Shinrei Tantei Yakumo, mais à l'envers). De ce fait, les scènes où Kujo se retrouve seul relèvent presque de la torture. Les derniers épisodes tentent de rétablir un semblant de nuance, mais tombent dans un autre travers qui est le pathos facile.
Les autres personnages sont quasi-invisibles, puisque tout dans cette série n'existe que pour mettre en valeur Victorique. Heureusement, cette dernière n'est pas le plus désagréable des personnages, et elle parvient à sauver la série de la nullité totale. Son passé est bien sûr au centre de l'histoire de la série et il est progressivement révélé. Son chara-design est réussi et son doublage également, et ces messieurs apprécieront le fait de savoir que Victorique aime la pipe.
Le cadre de la série est sans doute la première chose à avoir attiré le spectateur. Bien que la principauté de Saubure soit fictive, on sent que le décor est inspiré de la France et voir notre bô pays ainsi utilisé dans une série d'animation japonaise a de quoi éveiller une évidente curiosité. Seulement, il faut avouer que si l'esthétique architecturale et le stylisme européen sont bien retranscrits (bien que très fantasmés, Japon oblige), l'histoire et la mentalité de l'époque sont à peine mentionnés. La Grande Guerre est évoquée, mais la fin de la série est une uchronie totale. Mais le problème numéro un, c'est la langue. Comment voulez-vous que s'opère une quelconque immersion dans cet univers si les personnages parlent japonais, se comportent japonais? Ça a l'air con comme ça, mais c'est ce genre de détails qui amoncellent et qui font que l'on regarde Gosick avec une énorme distance, sans que l'on ne soit touché par quoi que ce soit. Je n'ai d'ailleurs même pas été touché par les génériques, que j'ai systématiquement passé par égard pour mes oreilles. On ne parlera pas de la réalisation technique, je ne suis pas méchant à ce point-là.
Le format de Gosick, de vingt-quatre épisodes, est tout à la fois sa plus grande qualité et son plus grand défaut. Qualité car cette longueur fait que l'anime prend son temps, évitant la précipitation qui caractérise certains animes récents. Mais il se trouve que Gosick n'a finalement pas grand-chose à dire; les personnages restent cantonnés à leurs stéréotypes et évoluent peu, les enquêtes ne deviennent pas plus intéressantes, et l'histoire de Victorique n'a rien de génial. Reste l'ambiance, que la série parvient à fournir tant bien que mal; le thème musical, qui revient sans cesse et qui marque; et les derniers épisodes qui contiennent plus d'émotion que la série entière.
Je me refuse à qualifier Gosick d'échec, car l'ensemble parvient à surnager au-dessus de la masse actuelle, tout bien considéré. Si seulement le personnage de Kujo ne gangrenait pas l'ensemble, la série aurait eu un potentiel infini. C’est bien ce potentiel que je juge et de ce point de vue Gosick fournit le minimum vital. Je conseille Gosick à ceux qui ont du temps devant eux et qui n'ont rien d'autre à regarder.
les plus
- Jolie direction artistique
- Le charisme de Victorique
- Conclusion surprenante
Les moins
- Rythme trop lent
- Enquêtes passables
- Kazuya Kujo... Le seul fait de le voir m'énerve