Difficile de garder la tête froide quand on voit les noms qui défilent au générique de ce film. Adaptation d'un manga du Dieu du manga Ozamu Tzeka qu'on ne présente plus. Réalisation de Rintarô (Adieu Galaxy Express 999, Harlock, le Roi Leo, les Moomins...). Scénario de Katsuhiro Ôtomo, le papa d'Akira. Direction artistique de Atsushi Morikawa (Jin-Roh, Sword of the Stranger)... Enfin vous voyez le topo. Le tout sous la houlette du studio Madhouse. Devant de telles monstres du cinéma d'animation japonais, il est difficile de se faire une place. Difficile de critiquer.
Surtout lorsque non contents de se reposer sur leurs CV ils délivrent une copie proche de la perfection ! J'entends les reproches de manque d'innovation. Manque d'innovation de l'hommage à Brazil en effet, à 1984. Hommage et non plagiat. La verticalité de Metropolis ne révolutionne pas le genre mais elle souligne la métaphore biblique de la Tour de Babel. Metropolis est une œuvre de jeunesse de Tezuka et ça se ressent, il y a quelques très rares maladresses et on y décèle des astuces qui seront développés dans ses prochains ouvrages. Certains pourraient même à juste titre parler ici de déséquilibre car le film, trop court, manque du temps nécessaire pour déployer ces ailes. On aurait souhaiter de précieuses minutes supplémentaires pour s'attarder sur les personnages ou mieux amortir les transitions.
Mais ou alors l'histoire se distingue-t-elle me demandez-vous ? Tezuka a souvent été comparé à Azimov. L'analogie ne manque pas de pertinence mais là où Azimov est un peu froid, Tezuka aime ses persos. Dans ce monde de métal perce une grande chaleur humaine. Les robots de Tezkua peuvent tomber amoureux, bien avant Wall-E.
Ce message profondément humaniste se retrouve mis en valeur par l'emballage technique. La bande-son jazzy n'est pas si anachronique dans la ville baroque de Metropolis. La direction artistique est au diapason. Le chara-design old-school, fidèle au trait du Dieu du Manga, nous leurre à la manière du plus récent Kaiba. Ne vous laissez pas détrompez : Metropolis n'est pas vraiment un film pour enfants. S'il aborde le thème innocent de l'amour, le film parle aussi politique, humanité, société... dans leurs plus noirs atours. Les décors oscillent de la noirceur des bas-fonds où vivent seulement les robots à la surface colorée de vie jusqu'aux cieux azuréens où seule trône la Ziggurat. Mieux encore, l'alchimie improbable sur le papier de l'animation traditionnelle et des CGI est très réussie. Aujourd'hui, les Anciens jugent un peu vite que les CGI dénaturent l'animation mais ils se trompent. Ce n'est qu'un outil et ne bride certainement pas le talent.
"L'utilisation des Computer Graphics est équivalente au rodéo américain. L'outil est comme un cheval sauvage qui peut devenir fou s'il est mal dirigé, mais, pour qu'un artiste la maitrise bien, ce même outil peut devenir d'un meilleurs outils pour l'animation."
Rintaro
Metropolis a lui aussi tout d'un animal à apprivoiser. Il faut s'en approcher avec précaution et gagner sa confiance pour le découvir dans toute la lumière.