‘Elle rit pour cacher sa terreur d’elle-même’ (3/3)
La Mélancolie de Haruhi Suzumiya, de Tatsuya Ishihara
De façon paradoxale, Haruhi, dieu omnipotent, est toujours seule, et même lorsqu’elle est entourée, elle ne parvient pas à être aimée ou comprise. C’est en cela qu’elle est attachante : bourrée de défauts et dangereuse, elle est toujours laissée dans l’ignorance, condamnée à se démener et à tout faire pour qu’un événement impossible se produise. Elle passe toute la série à envoyer des signes vers l’inconnu, elle va jusqu’à nommer son club la « SOS Brigade », matérialisant ainsi son appel à l’aide. Cette béance qu’elle a en elle nous est révélée très clairement dans l’épisode 13 (selon l’ordre de diffusion), dans une scène qui fait partie des plus belles de cette première saison : Haruhi explique à Kyon comment grandir a été pour elle un moment douloureux. Elle a alors compris à quel point elle était ordinaire, à quel point tout ce qu’elle faisait n’avait aucun sens, puisque tout le monde faisait exactement les mêmes choses qu’elle. Rongée par le désir d’être une personne exceptionnelle, elle s’est refermée sur elle-même et a décidé de jouer la comédie en permanence et de provoquer le destin en espérant que quelqu’un ou quelque chose vienne la sauver. Même dans cette confession elle reste seule : Kyon ne répond rien, et il la laissera même rentrer sans l’accompagner, preuve qu’entre elle et le monde extérieur aucune interaction n’est possible. Toute la beauté de cette jeunesse désoeuvrée est infusée dans ce personnage, qui, comme tout adolescent rêvant de vivre des aventures exceptionnelles, joue à se faire peur. C’est ici que toute la poésie mélancolique de la série entre en action : simulant en permanence un intérêt pour des affaires qu’elle sait être banales, Haruhi en vient à créer sans le savoir la réalité qu’elle désire : lorsqu’elle enquête sur l’île en cherchant un meurtrier, elle accouchera d’une ombre malfaisante qu’elle n’aura hélas à aucun moment l’occasion de voir : en permanence, notre héroïne se voit refuser tout droit à être exceptionnelle. C’est en partie la faute de ses amis, qui lui cachent tout et qui font tout pour qu’elle n’apprenne pas sa vraie nature, mais c’est aussi la faute d’un malheureux hasard qui la maudit en permanence. Dès lors, comment peut-elle espérer avoir une vie sociale normale ? Elle en est à un tel degré de désespoir qu’une fois le concert terminé elle ne sait pas comment réagir face à tous les remerciements qu’elle reçoit : Kyon le fait remarquer avec détachement, mais cette vérité est triste, Haruhi n’a jamais eu l’occasion auparavant d’être regardée par ses camarades comme une amie sur qui l’on peut compter, et vivre cette expérience n’aura pas eu un effet si bénéfique que ça sur elle, cela l’aura simplement faite paniquer un peu plus…
La faille que l’on perçoit dans l’âme de cette écolière trouve un écho dans sa nature ambivalente de dieu créateur/dieu destructeur : force positive, Haruhi a la capacité de donner la vie, de faire naître des personnages extraordinaires et des événements fantastiques. Force négative, elle peut anéantir le monde et le recréer sans aucune pitié pour ses habitants. Naturellement, ce comportement est inconscient, c’est ce qui fait tout le sel de la série, qui gravite assez souvent dans les mêmes sphères qu’Evangelion lorsqu’on arrive en fin de saison. Si Haruhi est un personnage touchant en tant qu’être humain, elle l’est aussi malgré tout en tant que divinité : son appel à l’aide inconscient, sa rage de ne pas parvenir à se satisfaire d’une vie banale, se trouvent décuplés inconsciemment et donnent naissance à des êtres célestes, que Koizumi montrera à Kyon. Désemparée, Haruhi engendre ainsi des créatures qui détruisent tout sur leur passage, prenant la ville pour cible de leur colère. Pourtant, malgré ce déchaînement de fureur, l’inconscient de cette déesse ne permet pas que les autres soient blessés, aussi crée-t-il une dimension spéciale, un espace clos où tout ce qui peut se produire n’a pas d’impact sur le monde tel que nous le connaissons : cela rend ces explosions de colère encore plus vaines, et plus touchantes pour le spectateur, puisqu’elles ne peuvent jamais être vues par qui que ce soit. Jusque dans le désespoir, la colère et la frustration, Haruhi est un personnage qui reste enfermé dans un espace clos, hermétique au monde extérieur. On n’est pas si loin que cela de la schizophrénie (d’ailleurs ces êtres célestes évoquent dans leur forme une autre divinité elle aussi à double face : le dieu-cerf de Princesse Mononoke), et l’on est terrorisé de voir avec quelle facilité la personnalité de cette héroïne extrêmement fragile peut être versatile et changer du tout au tout. Toute la structure de la série met cela en abîme, en présentant les épisodes dans le désordre, ce même désordre qui règne dans l’esprit de Haruhi.
Ce dieu destructeur semble chercher à se neutraliser lui-même en créant des contre-pouvoirs capables de venir le calmer ou l’endormir : c’est précisément le rôle qui incombe à Koizumi, gardien créé par Haruhi pour venir l’empêcher de tout casser lorsqu’elle perd pied. On reste perplexe face à cette profonde déchirure qui ne parvient jamais à cicatriser en elle. Elle est tellement aveugle, tellement sourde à elle-même qu’elle ne parvient pas, jusqu’à la toute fin, à découvrir la vérité : Evangelion propose une fin désespérante parce que Shinji reste passif jusqu’au bout, La Mélancolie de Haruhi Suzumiya propose une fin « désespérante » parce que l’héroïne ne comprend pas les enjeux de ce qui se produit, et que, une fois enfermée dans cette zone de non-retour où les créatures célestes détruisent tout (épisode 14), elle assiste au spectacle le sourire aux lèvres, habitée par on ne sait quelle passion morbide de tout voir s’écrouler : arrivée au bout de sa mélancolie, elle est prête à accepter même la fin du monde pourvu que quelqu’un vienne la sauver de sa terreur d’elle-même. On est particulièrement ému de voir ce personnage entrer dans une joie délirante à l’idée d’assister à une catastrophe, moment-clé où elle est au bord de se perdre définitivement, et où Kyon décide de faire le « mauvais » choix en l’embrassant. Cet espace clos, elle l’a créé dans le vague espoir d’y faire pénétrer Kyon : cet espace matérialisé devient le symbole du désir de Haruhi de faire pénétrer Kyon dans sa vie, de faire de lui un ami véritable, au-delà même de l’attirance sexuelle qu’elle peut éprouver pour lui. Or, hermétique à elle-même, elle ne saisit pas ce moment où elle est enfin seule avec la personne qu’elle aime : au lieu de cela, elle court dans les locaux vides du lycée, abandonnant Kyon dans la salle du club pour partir chasser des fantômes et se convaincre qu’elle est en train de vivre quelque chose de formidable. Echec suprême, elle ne parvient pas à faire le premier pas, et c’est Kyon qui décide de faire cesser tout cela en l’embrassant, cela afin de court-circuiter la marche des événements. Ce faisant, il ne fait que répondre au désir de Suzumiya, et exploiter l’image qu’avait employée Mikuru : Haruhi est comme Blanche-Neige, lui a-t-elle dit, laissant entendre qu’elle attend toujours le prince charmant. Mais Kyon n’est pas ce prince charmant, il désire d’abord Mikuru, mais ne sait pas choisir entre la pulsion sexuelle et l’attrait sentimental. Le malaise se fait alors pesant.
Ce baiser n’est rien d’autre qu’un baiser de Judas, un reniement de soi et de ses principes d’honnêteté, qui ne pourra pas rester sans conséquences, et qui devra conditionner toute la saison 2, si les producteurs espèrent ne pas dévaloriser cet univers fragile et beau.
Qui nous gardera de notre Gardienne ? (1/3)
Obéir sans aimer (2/3)
‘Elle se débat dans sa cage mais ne veut pas la quitter’ (4/3), par Kabu
23 commentaires
Tu met bien en avant l'aspect de de la personalitée de haruhi et c'est ce qui importe justement sur tout la serie.
Cette personne touchante qu'est Haruhi Suzumiya va être vu sous un nouveau jour pour ceux qui n'ont pas compris la serie
Oui espérons que la saison 2 sera à la hauteur mais bon Kyoto Animation nous a toujours surpris a ça ne risque pas de finir avec cette serie mère de ce studio d'animation.
(sa va bientôt faire 3 ans qu'ils sont dessus).
Très bon dossier watanuki =]
J'ai beaucoup été spoilée sur ce coup mais je ne le regrette pas (comme quoi on peut l'apprécier sans avoir forcément vu la série o_o)
D'une manière générale et même si je ne suis pas d'accord avec tout (je l'ai déjà dit dans les précédentes parties), cet article décrit d'une manière assez négative Haruhi et son "désespoir" et ouvre du coup une nouvelle perspective : et si Asakura avait choisi la seule "vraie" voie, celle qui consiste à provoquer volontairement des réactions de Haruhi plutôt qu'assister passivement à ses pulsions et se contentant de "boucher les trous" comme le font Koizumi, Yuki, Asahina et même Kyon ?
>Kyoto Animation nous a toujours surpris a ça ne risque pas de finir avec cette serie mère de ce studio d'animation.
J'espère que tu as raison sur ton pronostic ;)
Panzerfaust, tu vois qu'on arrive à s'entendre o_o :)
Merci pour les commentaires.
En tout cas, même si ta vision est personnelle et que je ne la rejoins pas nécessairement (pour moi, ce n'est pas réellement une erreur pour Kyon d'avoir embrassé Haruhi ; il a peut-être réalisé ses vrais sentiments - très jap ça - et il n'a pas l'air d'être tant préoccupé par le moe de Mikuru à cet instant précis); tu as le mérite de la justifier largement et d'être tout à fait crédible =}
En tout cas, ça m'a donné envie de revoir la série ^^
Néanmoins pas trop d'accord quand tu parles de schizophrénie. Si il fallait donner une affection à Haruhi je pencherais bien plus pour une psychose maniaco-dépressive.
Mais parler de psychose dans le cas d'une déesse qui s'ignore c'est sans doute aller trop loin. Les hallucinations sont par définition un phénomène subjectif, hors ici elles ne le sont plus puisque ce matérialisant dans la réalité et étant visible par tous. On pourrait surement parler de réalisation de fantasmes... ou en tout cas de leur projection.
Sans rire, belle conclusion. Les possibles divergences d'interprétation des scènes clés montrent bien que la série - sous son déguisement d'anime légèr et rigolo - bénéficie de personnages très travaillés et difficile à cerner.
Comme tu t'en doutes je ne suis pas du tout d'accord avec la fin de ton troisième paragraphe, de même qu'avec les trois dernières lignes, mais j'ai déjà longuement exprimé mon opinion là dessus dans la deuxième partie de ton dossier, je ne vais donc pas encore y revenir :) En revanche pour le reste je rejoins tout à fait ton analyse, j'ai eu le même ressenti.
Merci d'avoir consacré du temps pour approfondir cette série qui le mérite tellement...
Je viens de lire les trois articles et, c'est un très joli dossier, vraiment.
Quand je pense que d'autres osent me sortir que les personnages de Haruhi sont creux et sans intérêt, voir un tel travail d'analyse me fait vraiment chaud au cœur.
Cependant, je ne saurais adhérer entièrement à tout, évidemment. Le principal problème, je pense, c'est d'avoir considéré l'anime comme un anime original, et non comme l'adaptation de romans. Forcément, la lecture de ces romans (et donc d'une histoire bien plus complète) fait voir les choses sous un autre angle.
Je m'en vais expliciter tout ça plus bas, mais d'abord, j'ai repéré quelques erreurs "formelles" dans le dossier, et donc si tu veux tu pourras les corriger :
Yuki ne se fait pas transpercer par le criquet (quelqu'un te l'avait d'ailleurs déjà dit en commentaire) mais par Asakura. (ou plus précisément par des bureaux scolaires qu'elle a transformé en pieux)
En fait il s'agit de l'épisode 13 (diffusion) ou 5 (chronologique), voire 6 (ordre Kaze)
C'est Mikuru adulte qui parle de Blanche-Neige. Yuki parle de la Belle au Bois Dormant et Koizumi se contente d'évoquer Adam et Eve.
[EDIT DE WATANUKI : ces corrections ont été intégrées au dossier, merci beaucoup Kabu!]
Et enfin l'auteur : Tatsuya Ishihara.
Certes on pourra discuter du fait que Ishihara est le réalisateur de la série anime de chez Kyoto Animation, mais ce studio ne crée pas d'anime originaux, ils ne font pour la plupart que des adaptation de romans ou visual novels.
En fait tous les "produits" (roman/manga/anime...) de la licence Haruhi sont estampillé du même copyright :
"Tanigawa Nagaru - Ito Noizi / SOS Dan"
L'auteur (celui qui a effectivement écrit l'histoire) est donc Nagaru Tanigawa.
Noizi Ito quand à elle est l'illustratrice des romans originaux.
Libre à toi de corriger ces quelques points ou non, bien entendu.
Passons au cœur de la chose, car c'est ce qui m'intéresse le plus.
Je suis en accord avec la plupart de ce que tu dis à travers ce dossier. Seulement il y a parfois des nuances à apporter à ton propos.
Attention à partir d'ici je pense que je vais dévoiler quelques points qui ne sont pas présents dans l'anime. Donc ceux qui veulent absolument se préserver pour Duke Nukem Forev.. euh... pour la saison 2 : gaffe au terrain miné. Rien de bien méchant mais on n'est jamais trop prudent.
Commençons par l'analyse du personnage de Haruhi.
Tu la décris comme un dieu enfant avide d'extraordinaire mais qu'un "malheureux hasard" empêche toujours de voir ses envies réalisées.
C'est juste. Elle a en effet des réactions d'enfant qui veux absolument rencontrer des personnages étranges et qui règne en despote sur son entourage. En revanche, concernant le fait que le destin ou les autres personnages l'empêchent de réaliser son rêve, ça n'est pas tout à fait vrai. En réalité, et Koizumi l'explique dans le fameux épisode 13 (ou 5), il y a aussi une part d'adulte chez Haruhi. Cet adulte rationnel réfléchit posément et se dit "les aliens, les esper et tout ça... ça ne PEUT PAS exister, de toute façon". En gros cette part adulte (certes plus difficile à percevoir) la limite. Elle fait en sorte que le monde reste un minimum cohérent mais aussi et surtout elle l'empêche de voir ce qu'elle a créé.
En outre, même lorsque Haruhi se retrouve dans une situation réellement extraordinaire (épisode 14 par exemple), sa raison la rappelle ensuite à l'ordre et elle se dit "c'était un rêve... non, un cauchemar plutôt".
Ce n'est donc pas seulement le destin et ses amis qui l'empêche d'accéder à ce qu'elle désire, mais elle-même qui se limite. Après on pourra dire avec ironie que dans sa position de déesse, Haruhi EST le dit destin...
Tu dis aussi qu'elle est d'un égoïsme sans borne, et qu'elle n'hésite pas à tout faire pour obtenir ce qu'elle veut, quitte à écraser son entourage.
Là encore, ça n'est pas tout à fait vrai. En apparence oui, elle "prostitue" Mikuru, elle en fait voir des vertes et des pas mûres à Kyon etc... mais il ya aussi des limites qu'elle ne veut pas franchir. Par exemple, et tu le dis toi-même donc ce qui rend ton dossier un peu contradictoire, lors des épisodes de l'île. Elle a créé une "ombre" qui serait celle du tueur car elle ne voulait pas que ce soit l'une des personnes présentes sur l'île qui soit coupable. Elle aurait très bien pu ne rien en avoir à faire ou pire, faire en sorte que ce soit l'un d'eux en particulier.
En réalité, Haruhi n'est pas totalement égocentrique, elle se préoccupe de ses camarades.
Je pense qu'elle les voit vraiment comme des subordonnés et qu'en conséquence elle endosse aussi les responsabilités qui vont avec sa position de chef. Quand l'un de ses brigadiers tombe malade, ou quand elle pense qu'ils ont un problème, qu'il y a des tensions ou autre, elle s'inquiète pour eux, et fait tout son possible pour améliorer la situation, même lorsque celle-ci n'impliquerait pas vraiment de problème pour sa personne. (Si Yuki tombait malade par exemple, on ne peut pas vraiment dire que cela la gênerait dans ses activités. Pourtant...)
Il en va de même en sens inverse. Yuki, Mikuru et Koizumi ont chacun leur intérêt propre, tu l'as dis très justement. D'ailleurs ces intérêts ne seront pas toujours en accords... bref.
Malgré tout cela ne les empêche pas de penser au bien-être de Haruhi, même lorsque ça n'est pas en accord avec les objectifs imposés par leurs supérieurs.
Koizumi par exemple dira plus tard "Si je dois choisir entre l'Agence et la Brigade, je choisirai la Brigade. Je fais partie de la SOS Dan avant d'être un Esper sous les ordres de mes supérieurs"
Passons au relations amoureuses.
Tu décris un triangle amoureux Haruhi - Mikuru - Kyon d'apparence classique mais qui est au final compliqué par une relation de force inédite. Tu n'as pas tord. Mais comme je pense la plupart des gens qui n'ont vu que le seul anime, tu oublie un élément de taille dans l'équation : Yuki.
Alors oui, dans l'anime, on ne voit pas beaucoup Kyon et Yuki batifoler dans les prés, c'est sûr. Dans les roman en revanche, cet aspect est de plus en plus développé au fil du récit, au point que Haruhi s'inquiète pour Yuki "qui va se faire dévorer toute crue par ce tordu de Kyon"
Il n'empêche, même dans l'anime des éléments sont là, planqués, invisibles, et qui révèlent que Nagato a elle aussi une place dans le jeu. Un classique : si tu prends les incantations de Asakura lors de son combat contre Yuki dans l'épisode 10 (4 chronologique), que tu les passes à l'envers, et que tu les ralentis ça donne "Tu aimes Kyon-kun, n'est-ce pas ? Je sais que tu t'en es rendue compte".
Ton triangle amoureux devient donc, à mon sens, un joli carré.
En fait vous vous en êtes tous rendus compte, Haruhi est une série qui fait un joli melting pot d'à peu près tout et n'importe quoi, de la comédie à la science fiction en passant par le policier et le fantastique. En plus du fanservice, il est donc naturel qu'on puisse aussi lui prêter des élément de harem anime, même si ça n'est pas vraiment mis en forme comme un anime ecchi basique (et heureusement) et même si ça peut faire grincer des dents.
Et qu'en pense Kyon dans cette histoire ?
Dans ce dossier, tu dis que Kyon n'est attiré que par Mikuru, et que son baiser avec Haruhi avait pour seul but sauver sa peau (celle de Kyon). Je reviendrai plus tard sur ce baiser en particulier mais pour l'instant intéressons-nous à l'affirmation que Kyon ne ressent rien pour Haruhi.
D'autres te l'ont dit ici bien avant moi, et j'irai dans leur sens. Kyon n'est peut-être pas directement tombé amoureux de Haruhi, il n'est pas "physiquement" raide dingue d'elle ni rien, nous sommes d'accord. Cependant, dans sa relation avec elle on ne peut jamais parler réellement d'indifférence. S'il est allé lui parler c'est bien parce qu'elle l'intriguait, qu'elle l'intéressait, titillait sa curiosité. Il a du ensuite supporter les conséquences de cet acte, en se coltinant tout ce qu'elle lui impose, mais finalement petit à petit il y prend goût. Dans l'épisode 14, il se demande effectivement ce qu'elle est pour lui. Il ne peux pas se résoudre à la considérer comme une camarade de classe ou comme le chef de la brigade, il se rend bien compte qu'elle est plus à ses yeux qu'une simple amie. Par la suite il aura honte de ce sentiment et ne voudra pas l'avouer : dans l'épisode 4 (le 7 chronologiquement, donc suivant directement le 14) quand Koizumi lui demande comment il avait fait pour rétablir la situation, il dit qu'il ne veut pas en parler, et qu'il préfèrerait tout sauf d'avoir à le refaire. Le chemin qui lui reste à faire par la suite, c'est d'accepter ce sentiment qu'il éprouve pour elle. C'est en partie ce que montre l'épisode 9 (14 chronologiquement) : Une relation plus intime et plus complice entre Haruhi et Kyon, qui, même s'il a cédé à son caprice en allant chercher le radiateur, commence à montrer son affection pour elle, et à ce dire que finalement "ça n'est pas si mal". Par la suite s'il doit choisir entre vivre avec ou sans Haruhi à ses côtés, il n'hésitera plus vraiment, il préfère être avec elle plutôt que s'ennuyer.
Haruhi c'est donc celle qu'il a du mal à suivre tant elle explose de dans tous les sens mais qui le fascine et qui lui permet de s'évader de sa vie morne et triste. Même s'il ne veut pas l'avouer, il en pince quand même largement pour elle.
Mikuru, en revanche, plus qu'un objet sexuel je pense qu'il la voit comme une pauvre chose qu'il faut protéger. Certes ses atouts ne le laissent pas indifférent, mais l'aspect "mignon" du moe qu'elle exerce joue un rôle important aussi.
Petite parenthèse sur le fait qu'elle ne fait rien contrairement aux deux autres. Le rôle de Mikuru petite, comme des autres, est d'observer Haruhi. Mais contrairement à eux elle n'a aucune capacité particulière, c'est une humaine "normale", et elle ne peut pas agir directement. Elle ne peut même pas prévenir Kyon sur son futur, car en fait elle n'est pas au courant de ce qui va se passer (et c'est pour ça qu'elle a peur et pleure en permanence). Elle est vraiment là en tant qu'observatrice extérieure au sens strict du terme. En gros c'est une cassette VHS vierge qui va servir à enregistrer ce qui se passe. Plus tard, une fois devenue adulte, elle pourra agir. Dans l'anime on le voit déjà. C'est la Mikuru adulte qui agit, jamais l'autre.
Bref tout ça pour dire que je pense que pour Kyon, il y a ces deux aspects concernant Mikuru : L'attirance physique directe et le désir de protéger.
Et Nagato ? Eh bien c'est encore différent. Yuki c'est celle qui le protège lui en fait. Il ne compte plus le nombre de fois ou elle l'a sorti de la panade. Il lui voue une sorte d'admiration, voire même un culte. Il l'appellera "Déesse Nagato" plusieurs fois dans le roman.
Et en même temps il n'a de cesse de vouloir la rendre plus humaine, et se targue d'être le seul à pouvoir lire des émotions sur son visage. Elle aussi le fascine, et il finit par l'aimer tout autant que les deux autres
Yuki c'est un peu la mère protectrice pour laquelle il aurait un complexe d'œdipe en quelque sorte (même si c'est exagéré)
Je pense que Kyon aime chacune d'elle car il trouve dans chacune une chose différente. C'est un peu pour ça que je parlais de mécanisme de harem anime.
Venons-en à la place réelle de Kyon et à son comportement à lui.
C'est là où ça diverge encore un peu plus. Ton dossier à un problème. (Et je ne dis pas ça pour le descendre, bien au contraire). Je ne sais pas si c'est volontaire ou si c'est simplement parce que l'anime montre plus cet aspect que les autres possibilités mais voilà : Ton dossier est trop centré et axé autour de l'analyse de Haruhi.
Je suis d'accord avec la plupart de cette analyse, l'enfermement sur soi et l'appel à l'aide désespéré autant que le dieu enfant inconscient (avec les restrictions dont je parle plus haut). Seulement voilà, Haruhi n'est pas le seul personnage sur lequel on peut se centrer pour décrire l'anime. Les trois persos étranges sont hors cours bien sûr, mais Kyon est en revanche tout aussi important qu'elle, et il est dommage qu'il ne profite pas lui aussi d'une analyse approfondie.
Pourtant il y a un moment ou tu touche du doigt cette importance, c'est dommage de ne pas l'avoir exploité d'avantage
Ne t'es-tu pas justement demandé pourquoi ces trois là (Mikuru est aussi dans le même cas, même si elle fait passer son message à travers Itsuki) attachent plus d'importance à leur relation envers Kyon que celle qu'ils ont avec Haruhi ?
Tu dis qu'ils ne cherchent pas à être vraiment ses amis, alors pourquoi en est-il différemment de Kyon ? Pourquoi est-il si important pour eux ?
Certes, en tant que seul régulateur possible de l'humeur de Haruhi, il leur est précieux dans leurs missions, mais je ne pense pas que ce soit vraiment la seule raison. Ne vous-est-il jamais venu à l'esprit que ce pourrait être lui le véritable maître du jeu ? Que Haruhi ne pourrait-être qu'un exécutant qui fait ce que Kyon voudrait lui-même faire inconsciemment ? Car Il le dis bien au début : Il croyais jusqu'à il y a peu en l'existance de ces êtres paranormaux de toutes sortes. Il voulait y croire mais a fini par abandonner...
N'allez surtout pas croire que cette idée est de moi ni que c'est un monstrueux spoil du roman. En fait personne ne sait vraiment, mais c'est une théorie assez répandue.
En lisant ton dossier, on voit quand même bien qu'il a un pouvoir de décision, qu'il n'est pas totalement passif.
Quand tu dis
ou
On voit bien que c'est parfois lui qui mène la danse, et bien malin celui qui pourrait nous prouver qu'il n'a en réalité aucun pouvoir (direct ou indirect) du tout.
Sur cette deuxième phrase ensuite tu dis qu'il a fait le "mauvais" choix, en l'embrassant. En gros il a pris la pilule bleue au lieu de la rouge. Hé bien non...
Le détail qui tue se trouve à la toute fin de l'épisode 14. Kyon dit "J'ai beaucoup de chose à lui dire, mais je vais commencer par lui parler d'alien et de voyageurs temporel". Dans l'anime on ne voit pas s'il le fait effectivement ou non. l'épisode suivant passe directement sur le baseball, sans parler de ce qui s'est passé avant. Et c'est là ou l'adaptation du roman en anime fait fort, car non seulement elle vous montre les choses dans le désordre, mais elle choisit surtout d'adapter des chapitres du romans qui ne forment pas non plus un tout continu. C'est à dire qu'il manque des bouts, qui chronologiquement sont entre l'épisode 14 et 4 (6 et 7) ou entre les épisode 7 et 6 (8 et 9). Ces bouts sont destiné à entrer dans la saison 2 (car sans eux la suite ne peux pas tourner de toute façon).
Tout ça pour dire que l'ami Kyon raconte tout à Haruhi, de A à Z.
Dès lors, tes hypothèses sur le fait que Kyon finit par se ranger du côté des esper et aliens et à laisser Haruhi macérer dans sa mélancolie s'avèrent inexactes. Au contraire, il cherche à la sortir de cet état, à lui faire se rendre compte que le monde dans lequel elle vit est extraordinaire.
Pourquoi alors les épisodes suivants (7 à 14 chronologiques) ne présentent pas une Haruhi au courant des phénomènes qui l'entourent ? Simple : Yuki avait prévenu Kyon, si il lui dit, elle ne le croira pas.
C'est elle-même qui s'enferme toute seule, alors que Kyon cherchait au contraire à la libérer.
Voilà, j'ai fait le tour des notes que j'avais prises, enfin je crois...
En tout cas sache que j'ai vraiment apprécié ton dossier et que c'est surement un des articles les plus réfléchis que j'ai lu sur l'intrigue de la série.
D'autres font tout un foin sur le hype et l'aspect commercial du titre mais la plupart oublie de parler de l'essentiel : le contenu et le message réel de la série.
Bref, merci à toi. (et pardon pour les fautes qui doivent parsemer ce post)
J'avais déjà lu cette théorie quelque part et je la trouve assez pertinente. Après tout, n'est ce pas Kyon, le véritable héros de l'histoire ? N'est il pas le narrateur de cette série ?
Bon, je fais le gars étonné mais je savais qu'il allait arriver cet énorme commentaire =P C'est même dommage qu'il soit "juste" un commentaire. Celui-ci pourrait presque être la partie "4 sur 3" du dossier... non? En tout cas merci Kabu d'avoir pris le temps d'apporter toutes ces précisions.
Je suis spoilé à mort sur cette série... =(
EDIT: ne t'attends pas à une réponse immédiate de Watanuki, il est en vacances jusqu'à la fin de la semaine prochaine et je ne pense pas qu'il aura accès à un point internet d'ici là.
Merci également à Kabu pour son long (mais apparemment nécessaire) commentaire. Comme l'a suggéré Diyo, il aurait presque sa place sur le webzine en tant que quatrième partie du dossier. Maintenant, j'ai bien envie de revoir la série pour pouvoir mieux suivre ce qu'il s'est dit ^^
Je lirai ça avec sérieux;
Sinon bravo et merci wata
-je déconne hein, ne le fais pas quoi :)
C'est fou ce que le mot PASSION a pu gagner en popularité ces derniers mois, ça en dit long sur l'influence potentielle d'un seul article sur la blogosphère française. Ou comment mettre le feu aux poudres avec un simple concept (et dans ce cas, pas de pétard mouillé, impossible de stopper la réaction en chaîne).
En tout cas ce webzine est vraiment intéressant, merci à vous pour ces publications !
Sinon, je pense qu'il y a aussi un peu d'ironie dans la façon dont tout le monde se met à parler de PASSION. Ca fait cri du coeur, mais en même temps je suis totalement d'accord avec l'idéalisme échevelé de l'article