Critique de l'anime Kaiba

» par Cheesus le
12 Mai 2009
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La série est décomposée en deux parties. Dans la première, Kaiba voyage de planètes en planètes, chacune très typée. Ces épisodes servent d'introduction à l'univers de Kaiba et font un peu penser au Petit Prince. On y découvre des mondes aux tonalités poétiques, un peu mélancoliques et merveilleuses, mais également cruelles, absurdes et cyniques. Ce sont les épisodes les plus marquants de la série, et de véritables bijoux de manière générale.

La deuxième partie rentre dans le fond du sujet qui lie tous les protagonistes et prend une tournure plus intellectuelle. Les rebondissements se succèdent aux révélations et la trame générale s'avère être très complexe. En raison de la nature de l'histoire, il n'est pas toujours évident de suivre qui est qui et de reconstituer la chronologie des événements. Et ce sont souvent des détails, parfois très fugitifs, qui donnent la clé de certaines scènes ou permettent d'appréhender des enchaînements. Un second visionnage est certainement nécessaire pour qui veut comprendre l'histoire dans tous ses détails. Mais cette faiblesse dans la narration n'enfonce pas vraiment Kaiba, car désorienter le spectateur est un but clairement affiché de l'animé, qui joue beaucoup sur les sensations. La découverte des épisodes se passe bien d'une compréhension exhaustive.

Le scénario est indéniablement torturé et plutôt original. La ficelle consistant à introduire un personnage plus ou moins amnésique afin que le spectateur s'y identifie tout en acceptant le monde tel qu'on lui présente peut sembler classique, voire éculée. Toutefois, ici ce n'est plus un simple prétexte, mais un élément normal sur lequel on joue, solidement intégré à l'univers de Kaiba. Le thème général n'a rien d'extraordinaire pour un récit de science-fiction, mais est développé ici sous un angle certainement plus poétique que technique.

Le style du dessin est assez inhabituel et très particulier, il ne peut susciter que l'adhésion ou le rejet inconditionnel. Même le style varie d'un épisode à l'autre. Les formes sont simples et les traits volontairement grossiers. Cependant l'animation est de haute qualité. Les images de synthèse, généralement utilisées pour les décors lors des scènes de poursuite, sont très bien intégrées et s'adaptent à la simplicité du dessin. Ce style enfantin tend à contrebalancer l'histoire aux propos très adultes, parfois assez durs et cyniques. Toutefois ce décalage n'est pas du même ordre que dans un Fritz le Chat ou un Meet the Feebles, dont le ressort est plutôt une critique sociale « déguisée ». Dans Kaiba, additionné au scénario, il contribue à effacer tout repère pour le spectateur et à le désorienter systématiquement.

Beaucoup de scènes font apparaître de forts contrastes de dimensions entre les personnages et leur environnement, ou encore tendent à effacer ou distordre les distances. En particulier dans le palais, où Warp apparaît d'autant plus isolé qu'il est puissant. Il y a de manière générale un contraste entre les apparences et les réalités qu'elles dissimulent. C'est un fil conducteur que l'on retrouve à tous les niveaux, que ce soit dans le fond ou dans la forme.

La thématique de l'identité est abordée de manière technique à travers la possibilité de dissocier le corps et la mémoire, et de trafiquer cette dernière. Ces manipulations, à la fois soumises à l'argent et objets de pouvoir, anticipant une transformation radicale de la nature humaine par le biais des technologies, constituent une source d'injustice et d'inégalité. Le concept est poussé à l'extrême sur la planète Abipa, dont la situation n'est pas sans rappeler Soleil vert. Dans cet univers, l'individu semble strictement défini par sa mémoire. Pourtant, certains personnages, par leur comportement, remettent en cause le fait que le corps ne serait qu'une enveloppe temporaire, un simple objet-marchandise que l'on peut même produire en série. Globalement, Kaiba abonde de critiques cyniques et grinçantes de notre société et des comportements qu'elle génère, sous forme de caricatures dans les planètes visitées par les protagonistes.

Un autre fil conducteur semble être la transformation ou la révélation des individus au contact des autres. On y parle également de solitude. Sans pouvoir en dire plus, cela et certains autres aspects font étrangement penser à Neon Genesis Evangelion...

Le comique n'est pas absent de Kaiba. Outre tout le cynisme émanant de nombreuses scènes, c'est au beau milieu des circonstances les plus sérieuses que naissent des évènements parodiques subtils et improbables.

Signalons que la musique, bien que plutôt minimaliste et construite comme variations autour d'un nombre réduit de thèmes, colle très bien aux différentes ambiances.

Mention spéciale aux personnages secondaires, faisant souvent preuve d'une grande force de caractère. Le fait qu'ils ne soient que brièvement, mais intensément développés, suscite la curiosité. Ils sont presque plus attachants que les personnages principaux, relativement prévisibles.

En conclusion, Kaiba est une série tout à fait hors-norme et d'une rare qualité. Son apparence enfantine cache un contenu d'une grande maturité. On regrettera toutefois que la magie de la première partie s'étiole un peu sur la fin.

Verdict :8/10
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A propos de l'auteur

Cheesus, inscrit depuis le 09/01/2009.
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