Il y a maintenant deux dizaines d'années que globalement, le genre aventure est régi par des codes très portés sur la quête de soi et la castagne. Ces derniers paraissent même obligatoires pour tout succès littéraire ou animé dans le domaine. Et c'est dans ce monde déjà bien établi que Spice & Wolf vient avec une douceur de vivre, un appel au voyage, et son lot de choses plus ou moins malsaines, emmener le spectateur dans son univers.
Un univers moyenâgeux où l'église avait encore les pleins pouvoirs, imposant une vision bien rude de la bienséance. Et c'est dans ce petit monde bien charmant, qu'il y a le protagoniste "Kraft Lawrence" : un jeune marchand ambulant justifiant souvent la fin par les moyens.
Bien solitaire, ce dernier a conscience qu'il ne pourra pas bâtir sa vie entière sur les routes et désir donc accumuler suffisamment d'argent pour se poser et troquer son cheval et sa calèche ainsi que sa vie itinérante contre un comptoir beaucoup plus tranquille.
Jusque-là, rien d'anormal, sauf que la foi monothéique de ce monde n'est pas vraiment absolue. En effet : il existe au minimum des divinités non-officielles pour ajouter un peu de piment à tout ça.
Enfin, quand on parle de "divinités", rien à voir avec les Dieux grecques ayant l'univers entier entre leurs mains ou de créatures titanesques aux pouvoirs colossaux se foutant sur la gueule. Non, on est plutôt dans la divinité protectrice et garante d'une tâche à petite échelle.
Evidemment, Lawrence et cette dernière se rencontrent et partent ensemble en quête de leur objectif respectif qui se rejoignent (la casa tranquillos pour l'un, et le retour sur la terre natale pour l'autre).
Bref, on va donc suivre ces deux loustics voyageant de villes en villes pour respectivement, le fric et la terre promise.
-Mais à quel moment ça devient intéressant ?
Bah... comme à chaque fois, ce n'est pas l'objectif final qui compte mais le chemin qui y mène, soit la vie au quotidien entre Kraft et la "Déesse" sans pouvoirs cosmiques nommée "Holo".
Et je suis obligé de constater que c'est plutôt bien foutu voir carrément bien écrit !
Souvenez-vous de ce que j'ai dit en introduction, et bien là : pas de quête d'identité ! Kraft sait parfaitement qui il est, ses rapports à la vie, la morale etc... il les connait déjà, ce qui donne un aspect adulte à l'oeuvre qui ne se perd pas dans la crise existentielle (du moins pour Kraft).
Le second point qui rend cette oeuvre si agréable au visionnage est qu'elle est un véritable hymne à la murge ! Les deux personnages ont en commun un amour de la cuite tellement bien amené : ni dans l'alcoolisme dépressif, ni dans la festivité excessive. C'est un mélange entre le verre de satisfaction pour un travail bien fait, et celui du réconfort. Rajoutez à ça un amour tout aussi passionnel pour la bouffe (surtout du côté d'Holo) et on obtient quelque chose de chaleureux parsemé du charme des tavernes rurales d'un temps qu'on ne connait plus à l'heure des grandes métropoles actuelles.
Du côté de leur relation, c'est aussi écrit avec une certaine subtilité : l'admiration que peut avoir l'un envers l'autre par moment ne vire jamais à la fascination, et la taquinerie réciproque des deux ne dérive pas vers l'amour fusionnel, tout en marquant autant l'attraction que la distance de part leurs différences.
Bon après, il n'y a pas que du positif dans tout ça : ils ont quand même réussi dans la saison 2 à foutre en l'air la plus belle scène selon moi qui symbolisait la rupture avec l'ordre établi sous le coup d'un running-gag foireux et déjà vu précédemment...
L'animation aussi n'est pas vraiment transcendante... Certes, elle est léchée, et si on fait l'impasse sur les plans à répétition sur la queue d'Holo qui donnent un peu dans le malaise à la longue; c'est plus qu'honnête.
Mais dans une oeuvre qui met le voyage à l'honneur, on aurait pu s'attendre à des plans larges somptueux sur les paysages histoire de faire vraiment ressortir le côté plein-air de cette escapade...
En résumé : Spice & Wolf est à regarder comme un hommage au temps calme, à l’apaisement, et bien que ça ne soit pas une météorite dans le genre, ça se laisse voir et revoir avec une bienveillance qui accompagne autant les personnages que le spectateur.