Xam'd est un cas d'école. Il est la preuve incarnée que l'on ne peut juger chaque partie indépendamment d'une œuvre (réalisation, bande sonore, scénario...) pour connaître la valeur de l'ensemble. En effet, chacune des caractéristiques de la production estivale de Bones tend vers la perfection.
Le chara-design est soigné et mature : il n'a pas à rougir devant ce que pourrait produire I.G., une référence pour moi. L'animation arrive à être dynamique tout en restant propre, un exemple à plagier (suivez mon regard...). Le mecha design est audacieux. Je préfère ne pas évoquer les décors et la colorisation éclatante pour vous faire fuir avec mes envolées lyriques.
La musique, si elle manque d'un thème vraiment marquant, est réussie. L'opening en particulier et les génériques en général sont parmi les meilleurs que j'ai pu entendre en 2008. Je ne les ai jamais passés, cette "non-lassitude" ne m'arrive pas souvent. Le doublage des seiyuu est impliqué et posé. Le doublage en français, s'il y a lieu un jour, aura fort à faire.
Le scénario est bien construit. Certes, tout se précipite dans les six derniers épisodes mais on comprend rétrospectivement que les seuls moments de calme ne servaient qu'à tresser un univers riche dotée d'une véritable consistance. Le seul reproche est de voir des passages traités bien trop brièvement mais on sent que les scénaristes ont été à l'étroit dans ces 26 épisodes et auraient eu besoin de plus de temps, une cinquantaine d'épisodes au moins, pour pleinement déployer leurs idées.
Les deux meilleurs éléments de l'histoire que je retiens sont primo la fin et secundo les personnages. La conclusion de la série s'il emprunte à la toute fin un raccourci un peu trop facile (doux euphémisme), on n'évite pas le deus ex machina de rigueur mais le terrain avait au moins été préparé : ça ne tombe comme un cheveu sur la soupe. Mais là où Xam'd se démarque de la concurrence, c'est par sa galerie de personnages. Les seconds rôle ne passent pas au second plan. Ils sont travaillés et c'est bien la première fois que je vois les parents du personnage principal développés. La scène où la mère d'Akiyuki court, pieds nus, à la poursuite de l'ombre de son fils disparu est la scène qui m'a le plus marqué : je ne suis pas près de l'oublier.
Cependant, malgré toutes ses qualités, la sauce n'a pas pris. peut-être que cela vient de ma formation de scientifique - on porte les lunettes de son éducation - mais je n'ai pas eu l'impression de voir une œuvre artistique. J'ai regardé un produit. Il y avait bien des artistes à la baguette - je suis myope mais pas à ce point-là - mais leur créativité semble avoir été bridée. J'ai vraiment eu l'impression de voir défiler la liste des critères du cahier des charges remplie soigneusement.
Mais si cette méthode est efficace pour un produit, elle n'est pas efficientes pour ce qui est d'une œuvre. La narration de Noir vous ferai envier le dynamisme d'un Tchekov mais je retiens cette série pour sa bande sonore. On retrouve les qualités littéraires de Oui-oui en regardant Kurozuka mais ses graphismes délirants sont pour beaucoup des bons souvenirs que j'en garde. Une œuvre a le droit d'avoir des défauts mais on doit ressentir l'envie des gens derrière à faire partager leur passion. C'est comme avoir un grand plat préparé par un grand chef avec les meilleurs ingrédients qu'on puisse trouver mais que le cuisinier aurait oublié de saler. Ça n'a pas de saveur, ou plutôt ça n'a pas la saveur qu'on en attend.
Je sais que l'animation traverse une crise de liquidités et la tentation de satisfaire de ce compromis sans risque est tentante. Pourtant, j'aime autant voir toute l'industrie de la japanimation s'écrouler tout de suite s'il faut renoncer à cette envie.
J'ai mis longtemps à écrire cette critique. Je pensais que j'arriverai à expliquer mon sentiment, je ne suis pas doué dès qu'on s'écarte des chemins rationnels. Mais je voulais être sûr de me faire comprendre.
Je ne peux pas "saquer" Xam'd, mais je ne peux pas non plus le porter aux nues à cause de son manque de perspectives. La frustration est immense, tout était là pour un chef d'oeuvre : on n'a droit qu'à un produit réussi.