Gunslinger Girl, malgré (ou grâce à) sa brièveté, touche profondément.
Oui, il y a de la violence, oui, on y vide pas mal de chargeurs et le sang coule, mais …
Gunslinger Girl, contrairement aux apparences, est avant tout une histoire de gens. Cet anime présente quelques jeunes filles que l’on a sauvées de la mort, mais que l’on a en retour déshumanisées en remplaçant des parties de leurs corps par des membres robotisés et en leur faisant subir plusieurs lavages de cerveau. Comble de l’horreur, on a mis une arme dans les mains de ces poupées mécaniques, puis on leur a appris à tirer et à tuer.
La question est là : ne sont-elles plus que des robots assassins – des simples machines dont on répare les pièces lorsqu’elles cassent, que l’on jette pour les remplacer lorsqu’elles ne peuvent plus servir, et que l’on « réinitialise » régulièrement en leur lavant le cerveau pour une plus grande efficacité – ou conservent-elles encore une part d’humanité ?
La réponse n’est pas simple. On ressent un malaise quand on les voit nettoyer leurs armes au lieu de jouer à la poupée ou quand elles expriment le souhait de continuer un boulot qu’elle semblent prendre très au sérieux.
Pourtant on s’émeut lorsqu’elles jouent, bavardent et rient entre elles. Elles sont conscientes de leur condition, mais s’en accommodent et sont heureuses ainsi. Leur corps est peut-être robotique, mais grâce à lui, elles peuvent continuer à vivre, éprouver à nouveau des sensations et des émotions. Elles ont une vie en partie différente de celle des jeune fille de leur âge, mais elles trouvent une reconnaissance dans leur travail, aussi répugnant soit-il. Finalement, la plus à plaindre est sûrement Claes qui ne peut plus prétendre au boulot et qui devient cobaye de laboratoire.
En fait, elles-mêmes cherchent leurs réponses à la question citée plus haut. Nous qui n’avons plus de souvenirs d’avant notre récupération et dont le corps est partiellement mécanique, nous qui tuons sans remords parce qu’on nous l’ordonne, pouvons-nous encore aimer et être aimées ? Et comment savoir si les sentiments que nous éprouvons sont réels ou bien un produit de notre conditionnement ? Plus simplement, pouvons-nous encore nous comporter comme de jeunes filles normales ? Là encore, la réponse dépend de la personne et du moment. Leur réaction oscille entre l’automatisme (lorsqu’on leur donne le moindre semblant d’ordre, elles obéissent immédiatement sans discuter) à l’émotion incontestablement humaine (par exemple Henrietta qui rougit). Toutefois, l’équilibre est fragile, et lorsque, par manque d’expérience, elles ne trouvent pas de réaction humaine appropriée, le conditionnement reprend le dessus et nous frappe durement, voir notamment la relation entre Rico et le garçon.
Face à elles, chaque tuteur a son propre comportement. Car, les relations vont par couple fille/tuteur. Le tuteur, c’est le mentor, l’instructeur, le grand-frère, presque le père, celui qui est à son chevet lorsqu’elle se réveille après son opération, celui qui l’entraîne au combat, celui qui la chaperonne en missions.
Eux aussi se posent cette question obsédante. Certains d’entre eux estiment qu’ils ne peuvent continuer ce travail que s’ils considèrent ces filles comme des instruments. D’autres éprouvent de l’affection pour eux et les voient comme des enfants que l’on peut gâter et choyer. Et nous, spectateurs, avons envie de côtoyer José pour dorloter Henrietta (sans doute la plus adorable de ces petites filles) et de donner des baffes à Jean pour lui apprendre à respecter Rico.
Le dernier épisode est sublîme, tout en douceur (ah, ces jeunes filles qui observent la pluie d’étoiles filantes en chantant la symphonie n°9 de Beethoven !) et clôt parfaitement la série sur un message d’espoir pour les gunslinger girls et leurs tuteurs.
Cadre des missions, on admire une Italie magnifiquement rendue (Rome, Florence, Sienne, …), comme une invitation au voyage. Le chara-design est également réussi, l’animation bonne malgré quelques ratés.
Gunslinger Girl, c’est aussi une musique de piano, douce, mélancolique et qui contient quelques notes d’espoir, à l’image de la série.