Sans être expert en Satoshi Kon, j’ai pu apprécier, au fil des années, les qualités esthétiques et scénaristiques de ses œuvres. Véritable monument de l’animation japonaise, son dernier-né était incontournable, et Paprika a su me séduire autant, voir plus que ses œuvres antérieures.
Certaines choses ne se discutent pas dans Paprika, et notamment le visuel. On peut adhérer ou non au character-design, mais en aucun cas il n’est possible d’objectivement critiquer le soin quasi parfait accordé à l’esthétique du film. Tout est travaillé, tous les plans méritent d’être minutieusement observés, et tout est beau.
Les références à d’autres monuments de l’animation japonaises sont assez récurrentes, et le néophyte comme l’initié y trouveront leur bonheur.
Les personnages, de part leurs physiques et leurs traits, possèdent tous unes personnalité très marquée et, d’une certaine manière, sont tous plus charismatiques les uns que les autres. C’est assez grisant, lorsque le monde de l’animation japonaise se borne, l’essentiel du temps, à nous pondre des personnages bateau, quasi insipides.
Les décors sont détaillés à l’extrême et le tout nous offre un environnement extrêmement crédible et complet.
Là où vous pourrez bloquer, c’est peut-être dans l’overdose étouffante des couleurs criardes de chez criardes. Personnellement, j’ai trouvé qu’elles donnaient encore plus de caractère à l’anime, mais je sais pertinemment que beaucoup n’apprécieront pas le ton global donné aux environnements visuels.
Scénaristiquement parlant, Paprika reprend exactement le genre d’histoires que les japonais apprécient, à savoir une trame que l’on doit suivre de manière plus active que passive.
Le registre de la frontière entre le rêve et la réalité perturbe, et parfois le spectateur, sans forcément rassembler tout son intellect fulminant, doit réellement se concentrer pour ne pas perdre le fil ténu de logique et de crédibilité reliant toutes les incohérences et les incompréhensions s’enchaînant à bon rythme.
Les concepts du DC-Mini et de la fameuse Paprika, thérapeute se baladant au beau milieu de nos ondes cérébrales, nous diagnostiquant via notre subconscient, sont vraiment originaux, bien traités et très prenants. On accroche tout de suite à la théorie de voyageur de rêves, qui peut quasiment tout faire. D’ailleurs, si toutes les possibilités qu’offrent les rêves nous épatent au départ, on se surprend rapidement à accepter très facilement toutes les aberrations défilant sous nos yeux purs et pragmatiques. Etrange, mais cela prouve à quel point le film est efficace. On assimile l’univers et ses codes à une vitesse folle.
La trame n’est pas en reste, et sert merveilleusement bien le scénario. Pas de séquences en trop, pas de dialogues naïfs et désagréables, pas de personnages inutiles ; tout le monde trouve sa place dans ce monde parallèle, à mi-chemin entre le conscient et le subconscient.
L’épilogue, sans être révolutionnaire, est en parfait accord avec tous les évènements le précédent, et, comble du bonheur, s’offre le luxe d’être de toute beauté.
Enfin, dernier élément de ma critique (the last but not the least), l’environnement sonore.
Il est très bon, et ce n’est pas peu dire. Les musiques, composées par Susumu Hirasawa (Millenium Actress, Berserk pour ne citer qu’eux), sont absolument somptueuses, conceptuelles parfois, et toujours en accord avec le thème général du film.
Le travail des doubleurs est lui aussi excellent, avec des tons en accord quasi-parfaits avec les personnalités des protagonistes. Mon coup de cœur évident revient à la doubleuse de Paprika, Megumi Hayashibara, qui paradoxalement, en incarnant un personnage fictif et irréel, parvient à donner vie à un autre personnage, qui lui est bien réel. Si vous n’avez pas compris, bah vous n’avez qu’à acheter le DVD !
Conclusion évidente de cette critique élogieuse : Paprika est un excellent film, scénaristiquement prenant et esthétiquement bluffant. Entre les séquences où l’on reste bouche-bé devant le visuel frôlant constamment la perfection et le plaisir simple de se laisser bercer dans une histoire originale et peu commune, vous en aurez pour votre argent si vous désirez acheter cette petite tuerie. Alors ne vous posez pas trop de questions, Satoshi Kon est de toute manière membre du panthéon des dieux de l’animation japonaise. Vous aussi, vénérez-le !