Critique de l'anime Paprika

Ce film éblouit par ses qualités graphiques: animation, character design, palette de couleurs très riche s'alliant parfaitement avec le thème principal du rêve. L'expérience musicale est tout aussi cohérente et très rafraîchissante.

Le thème principal choisi rend difficile l'élaboration d'une histoire complexe. Le rêve est synonyme de fantasmagorie, d'exagération, voire de "n'importe quoi" parfois. Par conséquent, rajouter une trame scénaristique complexe par dessus risquerait peut être de perdre le spectateur et rendre du même coup insaisissable la pensée de l'auteur.

La thématique onirique nourrit ici un questionnement plus essentiel qu'il n'y paraît au premier abord. Le rêve est en fait vu comme ultime échappatoire des contraintes qui nous sont imposées par la vie en société, et qui atteignent leur paroxysme dans de grandes mégalopoles comme Tokyo par exemple ; regroupant toujours plus d'individus, et en oubliant parfois (cf. Tokyo Godfather), avec leurs rêves en plus. Ces rêves oubliés sont dans le film représentés par cette parade psychédélique qui défile vers on ne sait quelle destination.

Tous les personnages de l'histoire sont associés à des contraintes particulières: Avoir perdu l'usage de ses jambes (Le Président du centre de recherche), Ne plus pouvoir bouger correctement à cause de son obésité (Le génial Tokita), être incapable de se libérer de ses démons intérieurs (Le policier), refouler sans cesse ses sentiments (Atsuko). Voilà pour les plus évidentes. Que se passerait-il alors si les rêves d'individus oppressés devenaient réalité. On assisterait à un déferlement d'un grand n'importe quoi, d'une parade gigantesque constituée des rêves et fantasmes multicolores de tout le monde. La fin du film, sans la raconter, peut paraître expéditive. Mais n'est-ce pas le cas de tous les rêves?

Satoshi Kon nous offre là une œuvre magnifique à tous points de vue, tant dans la maîtrise technique que dans l'exposé de la problématique. A voir absolument.