Critique de l'anime Shiki

Je vais essayer dans ma critique de limiter évidemment le spoiler, bien que je sois assez tenté de reprendre un grand nombre de phrases de cet anime pour mettre en valeur son ridicule. Et surtout, je vais essayer de rester de bonne foi, car tout dans ce machin n’est pas à jeter à la poubelle.

Je ne savais pas à quoi j'avais affaire avec cette série, si ce n’est, selon des critiques extérieures, un peu de frayeur. Dès les premiers épisodes nous savons finalement à quoi nous attendre : une énième histoire de morts-vivants, car certains personnages ont des gros trous noirs à la place des yeux.

Le problème numéro 1 vient de cette ironie dramatique totalement absurde : aucun personnage ne semble s’apercevoir de cette particularité physique, alors qu’elle nous saute vraiment aux yeux. Nous savons tout de suite que ce ne sont pas des humains, mais les villageois mettront la moitié des épisodes à percuter. Des longueurs donc : la première moitié de l’anime est inutile. Aucun suspense, puisque si les personnages pensent à une épidémie pour expliquer les cas de morts étranges (ce qui est logique comme raisonnement premier), nous autres savons bien qu’il s‘agit d’une cause surnaturelle. Bref, si les shikis n’avaient pas des gros yeux noirs, peut-être aurais-je eu plus de surprises lorsque le docteur s’est écrié vers l’épisode 12 : « c’est une poupée ressuscitée ! » Sans blague, docteur…

Pas de suspense, et donc fatalement pas de frayeur : nous comprenons tout, contrairement à des animes comme les No Naku Koro Ni où tout n’est qu’incompréhension et mystère. Le personnage a certes peur quand il croit voir un mort-vivant au début parce qu’il pense que ça n’existe pas, mais nous autres savons bien que c’est une fiction et qu’ils sont le thème de cet anime : nous ne pouvons ressentir d’empathie pour les victimes et avoir peur pour eux.

Pas de peur, juste du gore : celui-ci est fort bien mené par contre. Des flots de sang, des têtes écrabouillées, des yeux qui explosent, il y en a pour tous les dégoûts.

Les titres des épisodes n’arrangent pas le côté ridicule : Huitième fatalité ! Neuvième cercueil !! Dixième meurtre !!! Onzième apocalypse !!!! Oui c’est censé mettre la pression.

Une énième histoire de vampires; à priori cela n’aurait pu que me plaire (de Vampire Knight à Twilight, en passant par des genres plus violents, tout cela me plaît, je suis un otaku romantique primitif vraiment pas dur à convaincre). Cependant cet anime voulait se démarquer, comme le montre un dialogue entre Kaori et son petit frère : « Les vampires, le pieux dans le cœur, le fait de ne pas pouvoir entrer dans une maison sans y être invité, tout cela n’est que dans la fiction, ici c’est la réalité ! ». Ils voulaient donc paraître originaux en abordant un thème mille fois revisité, en se démarquant des simples histoires de vampires en se prétendant plus réaliste, et c’est le problème, puisqu’ils ne le sont pas du tout. Comble sublime de l’auto-dérision : il faut effectivement un pieux dans le cœur pour tuer un vampire dans cet anime, et effectivement ils ne peuvent entrer dans une maison sans y avoir été invité… J’en passe.

Pour ce qui est de la dimension philosophique (qui semble être évidemment le plat principal de cet anime), la question semble être de pouvoir comprendre les raisons des agissements de tous les personnages, pour ne pas condamner trop à la hâte les uns et défendre les autres.

Mais je pense que c'est ici un subtile piège. Pour ne pas spoiler, je vous demande de regarder cet anime avec un regard lucide: ne pas pardonner quelqu’un juste parce qu’il se met à pleurer devant vous, et que des flashbacks émouvants interviennent avec une musique triste pour prendre sa défense. Restez lucide devant le pathétique, et ne condamnez pas le manichéisme trop rapidement. Car selon moi, cet anime reste malgré tout extrêmement manichéen.

La musique est souvent ridiculement utilisée : je ne parle pas des petites BGM musicales, qui sont fort agréables, mais plutôt des interludes chantés qui surviennent à chaque fois qu’un évènement est censé être terrifiant. Vous savez cette fille qui se met à chanter une note toutes les 3 secondes à différents octaves pour bien nous faire comprendre qu’à cet instant, vous êtes censés avoir peur. (Et pourtant, dans l’absolu, j’aime beaucoup cet OST, mais le contexte ruine tout).

A côté de cela, des génériques absolument excellents. Malheureusement, les Ending à chaque fois montrent un aperçu de l’épisode suivant, ce qui constitue un gros spoiler assez énervant.

[[ Ici, je me laisse peut-être aller au spoiler…

Des incohérences à droite à gauche :

- Les vampires ne veulent pas être découverts, soit, mais pourquoi donc vont-ils habiter dans le seul village qui a pour légende que les morts peuvent ressusciter ? Franchement quoi…

- Mentalité de Seishin : « Non docteur, tuer les morts c’est mal ! Que dirait leur famille s’ils meurent ? ». Ou : « Tuer les autres c’est mal, mais vouloir survivre n’est pas un crime... »

Et beaucoup de ridicule :

- « - Pas de marques de luttes docteur ? - Non, il n’y a aucune blessure externe, je suis formel. – Mais c’est quoi ces deux gros trous sur la nuque là, qu’il n’y avait pas hier et que tous les cadavres ont ? – Quoi ? Ca ? Mais enfin, ce doit être un moustique ! C’est béguin ! Ne me dérangez pas pour des futilités pareilles je vous prie, on en reparlera éventuellement dans une dizaine d’épisodes. » ]]

Et j’en passe. Beaucoup de personnages, mais peu d’attachants donc. Ils ont presque tous leur part de stupidité repoussante.

Qu’est-ce qui sauve cet anime ?

Tout d’abord le personnage du docteur, qui utilise vraiment sa matière grise, agit tantôt de manière excessive sous la panique, ou rationnelle pour lutter efficacement : il sait agir quand il le faut. On s’attache très facilement à lui, qu’on soit d’accord ou non avec sa manière d’agir (lui-même à al fin se demande s’il a fait le bon choix). L’épisode 14 est de loin mon préféré et celui qui m’a le plus remué : le docteur exténué dans toute sa laideur humaine.

Mention spéciale aussi au déjanté extraverti aux cheveux bleus clairs et grandes oreilles, à la fois amical et violent, il ne se laisse jamais déborder par ses émotions, et agit toujours pour protéger son idéal. Si on le craint au départ, on commence progressivement à le comprendre, le découvrir sous de nouveaux jours.

La plupart des autres personnages se posent de faux problèmes, sont lâches, et se servent de prétextes trop pratiques pour justifier leurs actes.

La fin m’a paru très étrange et un peu à la va-vite pour le nombre d’épisodes inutiles qu’il y avait avant. Cependant le dernier épisode, même s’il ne propose pas de fin définitive, met habilement un terme à tout ce chaos je trouve, et en renvoyant à l’intrique première du premier épisode (comme Megumi) pour montrer que cet anime forme un tout.

Finalement, même si je n’ai pas vraiment apprécié, je reconnais que c’est une histoire complète, qui propose une problématique et la résout audacieusement. Tout n’est pas à jeter loin de là, mais beaucoup trop de choses à modifier. Il en faut finalement peu, je pense, pour rendre cet anime bon et angoissant comme il eut dû l’être.