Canaan, véritable fresque humaine

Canaan n'est pas un de ces animes dont le spectateur peut ressortir indemne. Œuvre prenante, elle le plonge dans un monde d'un surréalisme effrayant, et pourtant tellement proche de notre réalité. Au cœur de ce voyage, Canaan brouille vos sens, déforme vos pensées, corrompt votre esprit, et bientôt, vous vibrez telle une balle fendant l'air, tel un cœur battant plein d'amour, tel un animal blessé qui attend et craint la mort.
Canaan est un de ces animes particuliers. Un de ces animes qui sait emporter, qui sait prendre aux tripes. Qui saura vous faire sentir concerné. Qui saura vous emprisonner au sein d'un tourbillon affolant.

Une dangerosité indomptable

Lorsque vous regardez Canaan, c'est presque si vous sentez son regard lire en vous. Lorsqu'elle parcourt des rues escarpées, court pour sauver sa propre vie ou celle de son amie Maria, vous êtes emporté dans son élan.
Le cadrage de cet anime est sans aucun doute un de ses plus grands points forts. Il saura vous toucher, vous intégrer dans la peau des personnages. Et on le comprend dès les premières scènes. La tension monte, vous la sentez en vous.
Graphiquement, l'animation atteint une certaine perfection dans sa fluidité, dans le réalisme des mouvements des personnages. La série ose. Elle ose des plans peu conventionnels, elle ose se différencier de ses pairs. Canaan est un anime d'action. Elle en a toutes les caractéristiques. Mais elle va chercher plus loin, et touche tout d'abord le spectateur par cette immersion totale dans le contexte et dans l'histoire.
Le charadesign se trouve correct, mais il faut bien se l'avouer, on aura vu meilleur. Néanmoins, il a la particularité d'allouer à tous les personnages une personnalité certaine, et rend l'anime ainsi on ne peut plus lisible. Malheureusement, si cela confère à la série une plus grande simplicité en terme de compréhension, on notera que cela manque au final un peu de subtilité... et le charadesign n'est pas le seul point de l'anime pour lequel on notera ce défaut...
La musique, agréable quand elle veut bien se faire entendre, souffre des choix du réalisateur, visiblement peu désireux de nous en faire profiter, on aurait préféré un peu plus de générosité de ce côté-ci. De plus, le réalisateur a largement démontré qu'il savait l'utiliser correctement durant certaines séquences.
Les seyuus s'en tirent tous très bien, et accompagnent les péripéties des personnages avec une justesse consternante. Mention spéciale à Rie Tanaka, dans le rôle de Liang Qi, qui aura parfaitement joué son rôle et porté son personnage d'une façon admirable, jusqu'à la fin.

Un scénario aux allures d'un chemin escarpé de montagne

Véritable attrait de la série, le scénario semble être ce qui la fait vivre. Complètement absorbant, il révèle malheureusement à la fin de la série des failles et finalement une certaine simplicité, pourtant insoupçonnée durant une grande partie de l'anime.
Car c'est ici que l'on voit l'intelligence certaine de la réalisation. Le scénario en lui-même n'est pas forcément remarquable. Il est même plutôt basique pour un anime du genre. Le tout est qu'il s'est, tout au long du cheminement de l'histoire, parfaitement accordé avec tous les autres éléments, fournissant ainsi au spectateur une unité plus que plaisante.
Malheureusement moins bien géré en fin de série, il laisse alors entrevoir ses faiblesses, et le manque de rythme certain des deux derniers épisodes y est sans aucun doute pour quelque chose. Ainsi, après avoir déroulé son fil à une allure plus que soutenue, la série prend finalement son temps pour nous offrir un dénouement relativement décevant, il faut bien se l'avouer.
La complexité s'effondre, mais d'autres éléments tels que les personnages ont pris l'importance majeure qu'occupait jusqu'alors le scénario. Finalement, en suivant ce schéma, l'anime aurait pu parfaitement s'en sortir en proposant un épisode de moins, et conclure ainsi en douze épisodes.
Car on nous en a fait miroiter, des choses. Entre les magouilles politiques plus au alléchantes, et le milieu corrompu dans lequel évoluent les personnages, l'anime s'échoue sur une conclusion peu appétissante vis à vis de ce qu'il nous avait été mis sur la table...

Des personnages que l'on attendait plus... jusqu'au dernier moment

Et voici, si je puis dire, la grande surprise de cet anime: ses personnages. On pensait qu'ils n'étaient destinés qu'à faire avancer l'histoire, et bien on se trompait. Car finalement ce sont les personnages qui constituent l'histoire elle-même.
Ainsi, comme énoncé précédemment, au lieu de clore la série avec un retentissement magistral, le scénario se rabat sur les personnages, personnages que nous croyions un peu vides dès le départ. L'anime utilise ainsi son dernier tiers pour les développer au fur et à mesure, alors qu'il avait passé le reste de son temps à mettre en place une intrigue des plus captivantes.
Mais à développer ainsi les personnages aussi rapidement, on assistera à des ratés, je veux bien sûr parler du trio principal composé de Canaan, de Maria, et d'Alphard, mais également à des réussites grandioses, les personnages de Liang ou de Hakko en sont les exemples les plus probants.
Mais pourquoi de telles différences ? Tout simplement, on a vu évoluer dès leur première apparition les personnages de Liang ou de Hakko. Car le majeur défaut de ces fameux développements un peu à côté de la plaque, c'est que malheureusement, le tout manque de finesse... et de subtilité. Nous revoici avec la subtilité dont je parlais tout à l'heure. La série, sans doute de peur que le spectateur ne comprenne pas, se met à travers des dialogues ou des monologues intérieurs à nous décrire ce que sont les personnages.
Le tout devient alors lourd, tombe finalement à plat, et oublie sa justesse et la double lecture à laquelle nous avions droit au début de l'anime. Dommage, il y avait là de quoi faire un véritable chef d'œuvre.

Somme toute, Canaan est un anime qui saura vous faire vibrer et vous embarquer au fil des rues escarpées, mais décevra immanquablement dans son dénouement, oubliant le public auquel il s'adresse, à savoir un public en grande partie adulte, et toute la subtilité dont le commencement de l'histoire fait preuve. Un anime prenant, à regarder, mais qui n'arrivera pas à préserver sa qualité et son énorme potentiel jusqu'à la fin.