Shin Sekai Yori fait partie de ces séries d'animation trop rares qu'on emporte dans un coin de sa tête une fois le mot "Fin" affiché à l'écran. Mieux encore, alors que la plupart se seraient contentés de n'aborder qu'une seule thématique, Shin Sekai Yori n'hésite pas à en affronter plusieurs, en même temps et où chacune va s'éclairer l'une l'autre. Le spectateur sent rapidement que c'est l’adaptation d'un roman qui aura su prendre le temps de bâtir un univers aussi consistant que cohérent.
Difficile d'en parler ici sans risquer l'inflation des lignes et de gâcher la surprise. Shin Sekai Yori est un cheminement à prendre une étape à la fois, une série à savourer. La prévention absolue est-elle justifier face à une menace elle aussi absolue qui met en balance la survie même de toute l'humanité? Ce choix qui peut se justifier ne nous coupe-t-il pas de notre propre qualité d'être humain? Qu'est-ce qui définit l'humanité? Quelle communauté est possible quand les membres qui la composent ont le potentiel de soustraire à la loi? Si toute évolution est forcément bonne au sens darwinien, doit-on moralement parfois la contraindre quand nous en avons le pouvoir et que cette même évolution est dangereuse pour les autres?
Ce ne sont pas forcément des questions que l'on trouve facilement sur les écrans, y compris dans la science-fiction qui se targue justement d'explorer toutes ces pistes méconnues. J'y ai retrouvé les mêmes bonnes sensations de malaises et de remises en question que j'ai pu éprouvées quand j'ai lu les Fables de l'Humpur de Pierre Bordage ou la Voix des Morts de Orson Scott Card. Là encore je n'ai pas encore trouvé de réponse. Il n'ait pas dit qu'il y en ait ou même qu'il est souhaitable d'en avoir une. Kishi Yûsuke et A-1 Pictures nous rappellent seulement l'importance de garder dans un coin de la tête ces questions.
Je ne cacherai pas que Shin Sekai Yori peut parfois être aride voire austère pour le spectateur. Le choix de se concentrer sur une histoire "simple" d'une bande d'enfants permet de se raccrocher aux branches mais ils font tout au plus office de prétexte à ce qui est dit en filigrane. C'est une série exigeante qui n'autorise pas de faire autre chose à côté ou même après sinon on parlait, y compris à soi-même lors d'une nuit qui s'annonce difficile. Malheureusement la réalisation assez inégale, notamment le chara-design qui a une fâcheuse tendance à partir en cacahuète d'un épisode à l'autre, un animation souvent minimaliste et des décors assez peu variés. Une sorte de Now and Then, Here and There mais Shin Sekai Yori est encore moins superficiel et a eu la chance de se développer sur une durée un peu plus longue. Pour conclure, voilà une série condamnée à un succès d'estime mais qui redore - et avec quel obstination - une industrie qui prend de moins en moins de risques.