De temps à autre, la japanimation nous offre de beaux contes poétiques. Haibane Renmei fait partie de ceux là et est aussi une petite exception. Il est bien rare que des Dojinshi servent de base à une anime. L'auteur Yoshitoshi Abe, un professionnel soit dit en passant, à qui nous devons Serial Experiments Lain, s'est servi de son travail de base sur le Dojinshi “les plumes grises dans la vieille maison” pour concevoir cette série. Il avoue lui même ne pas avoir construit l'histoire sans trame ni intrigue préétablie.
Et grand bien lui a pris, même si cela peut avoir certains revers. Abe a crée un petit monde mystérieux, teinté de mysticisme. Le lieu d'action consiste uniquement en Guri, une petite ville à la touche européenne ceinte d'une grande muraille grise. C'est là que vont s'ébattre et vivre ses héroïnes si particulières, les Haibane Renmei (Ailes grises). Elles ont tout les attributs des anges, ailes et auréoles, apparaissent de façons mystérieuses et ont un cycle de vie des plus étranges. Elles y évoluent jusqu'à leurs envols ou leurs disparitions.
Le chara-design a son charme, l'animation est de bonne qualité pour une œuvre de ce genre. qui ne nécessite pas de prouesse technique. Les décors sont bien réalisés et servis par une palette de couleurs chaudes, au final on se prend à aimer et admirer la ville de Guri. L'OST est de bonne qualité, cordes et piano principalement, aux tonalités assez jazzy et sert efficacement l'image et l'émotion. L'opening lui, est une partition instrumentale “Free Bird” qui fait partie de ceux que l'on se reprend à fredonner et qui communique une certaine émotion à l'auditeur.
Ce conte démarre et se centre sur Rakka, une nouvelle Aile grise avec laquelle nous découvrirons Guri. Abe nous livre une petite galerie de personnages bien croqués et définis même si au final tout se centrera principalement autour de Rakka et Reki. L'histoire est paisible et peu animée en fait. Elle prend rapidement au détour de la chronique de vie des Haibane des connotations mystiques. Les thématiques du péchés mais surtout de la rédemption sont abordées de façon intéressante. Je dis intéressante car même si une très grande partie de la symbolique est d'inspiration chrétienne (les Haibane ont des caractéristiques d'ange, ailes et auréole, elles s'envolent près d'une chapelle), les notions morales et philosophiques qui sont sous-entendues et utilisées ne sont pas chrétiennes elles. Ce qui pourrait soulever certaines interrogations chez nous p'tits occidentaux.
C'est une belle histoire dont les qualités peuvent être perçues comme des défauts. S'il n'accroche pas au contenu poétique de l'histoire, le spectateur ne verra qu'une histoire plate, lente et sans grand intérêt. Dans Haibane Renmei, il ne se passe pas grand chose à proprement parler. Il faut apprécier les huis-clos à fond psychologique, Abe use et abuse de la licence poétique pour ne détailler ni expliciter outre mesure son monde. Le spectateur par trop cartésien n'appréciera nullement et y verra un coté inachevé et frustrant.
Et pourtant, pourtant, pour ma part, je ne cacherai pas que j'ai adoré cet anime justement à cause de ce coté mystérieux et son empreinte mystique, du coté humain retranscrit avec justesse, car bien souvent, on se fourvoie soi-même dans des impasses. L'histoire prend une tournure plus tourmentée et s'achève sur la fin de parcours d'une des protagonistes. De nombreux points conservent pourtant leurs mystères.. Mais tout doit-il être rationnel et clair comme de l'eau de roche ? Justement non car c'est une série qui parle au cœur de son spectateur et on ne peut que la recommander justement pour cela.