OU L'ON APPREND QUE L'AGORAPHOBIE N'EST PAS PLUS FORTE QUE LA FAIM
NHK Ni Youkoso! est un chef-d'œuvre scénaristique, disons le d'emblée. À côté de ça, une réalisation magnifique et une bonne OST me permettent de dire sans gêne, bien qu'après mûre réflexion, que ce manga peut rejoindre Death Note au Panthéon des grands animes. À la différence près que Death Note est plus proche du genre Shônen, qui est beaucoup plus populaire. C'est simple, on en aurait fait un long métrage de deux heures, il aurait amplement mérité la palme d'or. Mais le scénario n'aurait pu se suffire de seulement deux heures. Voila pour l'introduction.
L'anime jongle avec tant et tant de concepts, dont certains accessibles uniquement aux japonais, qu'il est difficile de faire ressortir dans un seul commentaire la profondeur du scénario. Le fait que les (quatre) personnages principaux soient travaillés avec soin, autant dans leur caractère, leur évolution et leurs doutes, rajoute à la complexité d'un scénario assurément exceptionnel. Dire que le personnage principal, Tatsuhiro Satô n'est qu'un hikomotori serait se tromper. Car le scénario s'efforce de montrer que nous sommes tous des personnes complexes, ne serait-ce que parce que nous sommes tout autant ce que les autres pensent de nous que ce que nous croyons être. NHK Ni Youkoso! est un ensemble d'équilibres, équilibres entre l'imaginaire et la réalité, entre les rêves et les désirs, entre l'identité et les préjugés, entre l'objectif et le subjectif, entre le besoin de l'autre et les sentiments pour l'autre.
L'égoïsme, le doute, le désespoir, la joie, l'angoisse, la résignation, le bonheur, toute une panoplie de sentiments qui ressortent à travers les actions des personnages. De l'otaku qui se bat pour vivre sa passion alors que ses parents veulent qu'il reprenne la ferme familiale, à la femme qui se noie dans un sentiment d'incomplétude malgré une vie sans accrocs, en passant par l'adolescente qui recherche un amour fusionnel pour avoir l'impression d'avoir sa place sur cette Terre, c'est un microcosme de personnes blessées par la société qui entoure le héros. Un héros ni héroïque ni anti-héroïque, juste un homme. Un homme qui ne trouve pas sa place dans sa société, mais qui refuse de se voir comme un sous-homme ou un déchet. Un homme qui porte à lui seul les poids des doutes de ses rares amis. Et qui finalement aide plus qu'il n'est aidé.
Cet anime est violent. Mais seuls ceux qui se seront posés des questions sur la vie, leur avenir et leur identité le comprendront. L'histoire met l'accent sur le combat des sentiments, sur des personnes se débattant dans l'immobilité de leur vie. C'est ce contraste qui est le fil conducteur du scénario. Les notes d'humour ça et là ancrent encore plus l'histoire dans la réalité. Certaines scènes rendent le personnage principal méprisable, à un tel point qu'elles en deviennent gênantes. Et tout cela fait de cet anime une peinture si réaliste des travers de la société qu'elle en devient effrayante. Avec un chara-design tout simplement parfait pour mettre en image le scénario, on ne peut qu'être happé par l'anime, du début à la fin.
Pendant que j'écris ce commentaire, l'angoisse provoquée par l'histoire me serre encore la gorge. Et pourtant je suis loin de cette réalité décrite par l'anime, tant au niveau de la culture que de mon caractère. Mais au-delà de la dimension tragique, c'est aussi la prouesse scénaristique qui me fascine. La mise en scène de vies dramatiques ne peuvent donner qu'un drame. Pourtant, c'est simplement la réalité qui est mise en scène ici. Et bien que l'anime se finisse magnifiquement sur une touche de tendresse , je crois qu'il me faudra un peu de temps avant de visionner à nouveau cet anime, parce que finalement, cette vie qu'il décrit... me fait peur.
PS: Si vous voulez comprendre mon titre, regardez ce putain de chef-doeuvre. Mais attention, âmes fragiles s'abstenir.