Katanagatari : The Demon Blade
Après avoir ingurgité une dose massive de soi-disant « comédies romantiques », je me suis dit qu’un bon petit anime d’aventure de derrière les fagots ne me ferait pas de mal. Je me suis tourné vers Katanagatari, parce que c’est récent, relativement court, et surtout parce que certains membres d’AK ont un réel talent pour faire la publicité des séries dont ils sont des fanboys. Le problème c’est qu’à force de clamer partout que nous sommes en face de l’anime incontournable de 2010, on finit par y croire. Jusqu’à ce que l’on regarde par nous même et que l’on se rende compte qu’il n’y avait rien de bien fabuleux là-dedans.
Ce qui est sûr c’est que Katanaganari sort des sentiers battus sur certains points. Cela peut être appréciable : mais en contrepartie il s’aventure sur des chemins tortueux, ceux que Bakemonogatari a popularisés il y a deux ans. En effet Nisio Isin, l’auteur du roman dont s’inspire Katanagatari et aussi celui qui a engendré Bakemonogatari (d’où le titre, hem). Vous aurez donc droit à une série qui privilégiera les dialogues à l’action. Or les animes bavards ça m’ennuie et ça m’agace, surtout quand ça ne mène nulle part. Et quand j’ai compris, au deuxième épisode, que Katanagatari utiliserait la même recette, je savais déjà que cette série ne pourrait jamais de la vie être l’animé de l’année, et que sa place dans mon classement personnel était compromise définitivement.
Mais avant d’en arriver là, j’ai une critique à écrire. Je vais commencer par vous exposer un peu le cadre ; puis on parlera des bonnes idées que cet anime introduit en matière de scénario et de narration ; enfin je reprendrai la partie polémique pour aborder les quelques défauts que j’ai pu relever lors de mon visionnage.
Bien que Katanagatari soit l’adaptation d’un roman, et que la Classification lui empêche d’être catégorisé comme un tel, il serait ridicule d’occulter le fait que nous sommes en présence d’un bon petit shônen. Un peu comme TTGL, c’est si évident que je n’hésite pas à faire une entorse à la règle.
Un jeune garçon ingénu mais surpuissant, qui vit reclus au milieu de nulle part, va rencontrer une superbe jeune fille qui va l’impliquer dans une quête pleine d’aventure et de combats. C’est comme cela que débute le premier tome de Dragon Ball et c’est aussi comme cela que commence Katanagatari. En lieu et place de Gôku et Bulma, vous avez Shichika et Togame ; en lieu et place des sept boules de cristal, vous avez les douze épées maléfiques. Et je peux continuer comme ça un moment.
Shichika est un naïf qui ne connaît pas des concepts de base comme la peur ou le désir, à l’instar de Luffy dans One Piece. Il n’est censé n’avoir jamais combattu en conditions réelles, pourtant il parvient à défaire des guerriers expérimentés, comme dans Naruto. De même, les combats de Bakemonogatari sont systématiquement interrompus pour que les belligérants puissent raconter leur vie, voire carrément expliquer à leur adversaire la technique qu’ils s’apprêtent à utiliser contre eux ; tout cela rappelant les belles heures de Bleach, Saint Seiya, etc.
Mes exemples ne sont pas choisis au hasard ; ils vous permettent de bien saisir que Katanagatari est un shônen en bonne et due forme, reprenant bon nombre de clichés du genre. Je pourrais en énoncer plein, le nekketsu débordant littéralement de Katanagatari. Ce qui est loin d’être un mal, car la série parvient à affirmer sa différence, du point de vue du scénario, de la narration, et des personnages.
Le scénario a de cela de très intéressant qu’il évite avec soin le manichéisme simpliste, qui oblige les gentils à combattre les vilains et à l’emporter. Dans Katanagatari, le duo composé de Togame et Shichika parcourt le Japon pour arracher les sabres maléfiques à leurs propriétaires, le plus souvent par la force. Parfois, on se demandera si nos protagonistes ne sont pas plus durs que leurs ennemis, n’hésitants pas à inventer des stratégies fallacieuses pour arriver à leurs fins (épisodes 7 et 9, entres autres). Chaque faction a ses objectifs, parfois clairement établis (les Maniwa se battent pour l’argent, Emonzaemon par loyauté), parfois beaucoup plus flous (Je n’ai strictement rien compris aux plans de Shikizaki Kiki et de la princesse Hitei).
La série fait douze épisodes pour douze épées. Une épée par épisode, un épisode par mois, un anime pour un an. Très logique, parfaitement calibré. Mais le scénario est établi de façon à ce que les épisodes se suivent de manière chronologique, et pas le moins du monde redondante. Grâce notamment à la mise en scène dont je vais parler maintenant.
Katanagatari introduit plusieurs idées de narration qui déstabilisent d’abord avant de révéler des plus pertinentes. En premier lieu, le format. Douze épisodes de 50 minutes chacun. J’étais circonspect au début, mais finalement cela fonctionne. Après tout, 50 min, c’est le format des séries lives non ? Et personne ne s’en est jamais plaint. Le revers de la médaille, et j’y reviendrai, c’est que cela laisse la place à ces fameux dialogues sans intérêt…
La mise en scène n’éclate pas la rétine par des artifices graphiques et autres effets de style superflus (si vous voyez de quoi je veux parler…) et s’avère juste et efficace. L’anime n’hésite pas à faire quelque clins d’œil au spectateur à certains moments. Par exemple la voix off de la narratrice qui intervient à la fin de chaque épisode n’hésite pas parfois à méchamment spoiler l’épisode suivant. Le fait d’afficher en gros Kanjis les noms des techniques que les personnages utilisent m’a fait plus d’une fois sourire. Mais je retiens surtout ce fameux épisode 4, dans lequel on vous fait miroiter un putain de combat archi-important pour finalement vous en montrer un autre qui n’a strictement rien à voir. On pourrait croire à une supercherie, mais c’est tellement bien amené que l’on en rit plus qu’autre chose. Ce sont toutes ces petites choses, couplées à la forme, qui font de Katanagatari un anime de haut niveau qualitatif.
La forme donc. Se déroulant dans un univers Japon-médiéval-fantastique, Katanagatari part sur de bonnes bases. Le chara design est quelque peu spécial, très coloré et pas du tout en phase avec l’époque Sengoku (normal pour un shônen, il faut que ça attire l’œil avec des costumes flashy). Les yeux des persos sont effrayants, ils ont tous des iris bizarrement formés, genre des yeux carrés ou des trucs comme ça. Mais au moins ça bouge bien, les rares scènes d’action promettent leurs lots de ralentis spectaculaires. Rien de transcendant, mais très suffisant (et puis de toute façon il serait difficile d’égaler le niveau d’Afro Samurai ou de Samurai Champloo qui sont des chefs d’œuvres absolus).
Fait rarissime, dans Katanagatari, la BGM est de meilleure qualité que les génériques, et ce même si il y a deux openings et un ending différent pour chaque épisode (le second opening devrait d’ailleurs rappeler quelque chose aux fans de Noir et Code Geass). On trouve dans la série des thèmes inspirés d’enka, et autres musiques traditionnelles japonaises, mais aussi du jazz, du classique, de la pop… une OST variée et plaisante, qui s’insère avec facilité dans cet univers à la croisée des chemins (même si on n’atteint pas la magnificence sonore d’Afro Samurai et Samurai Champloo qui sont des chefs d’œuvres absolus ^^). Le travail de doublage est honorable, et de toute manière bien mis en valeur, vu que dans cet anime on passe son temps à discuter…
Un paragraphe sur les personnages. Ils sont ratés. Les personnages principaux tout du moins : je ne suis pas arrivé à ressentir la moindre empathie pour l’inhumain Shichika ou Togame la calculatrice. J’ai eu beaucoup plus de considération pour des personnages secondaires comme Tsuruga Meisei, ou encore Konyaku Itezora, qui ont du charisme et de vraies raisons de se battre. En fait, les possesseurs de sabres maléfiques ont tous quelque chose d’intéressant, même Sabi Hakuei qui n’intervient que deux minutes. La palme revenant tout de même à un certain personnage qui malgré les apparences, s’avère être le psychopathe le plus sanguinaire et dérangé que j’aie vu depuis longtemps (je ne spoile pas plus, mais je dois avouer que les épisodes où elle intervient sont bien jouissifs).
Rien que pour ces onze personnages + un robot, la série mérite d’être vue. Les différents pouvoirs des katanas de Kiki sont variés, différents et bien pensés. Cela m’a rappelé l’intelligence d’écriture des arcs scénaristiques qui caractérise les animes adaptés de romans que j’ai pu voir.
Ce que je n’ai pas supporté, c’est la relation entre Shichika et Togame, qui n’a ni queue ni tête. A la manière d’Araragidiot et Senjougaharabrutie, ces deux là sont liés par ce que l’on nous présente comme de l’amour. Mais en l’occurrence l’amour ne se différencie pas de la relation servile de maîtresse et animal de compagnie. Togame est le cerveau et Shichika ce sont les muscles. Shichika est censé être fou de Togame mais il ne la regarde même pas et elle n’en a strictement rien à foutre de lui. C’est donc ça l’amour que vous voulez voir ? Des « je t’aime » balancés à droite et à gauche, une relation bidon qui ne repose sur rien mais que la fan-service maintient en vie ? Dommage que Katanagatari reprenne le plus gros défaut de son prédécesseur.
Je ne parle même pas de l’épisode final, gangréné jusqu’à la moelle par un pathos larmoyant à deux francs et dont la conclusion est des plus invraisemblables (Bonjour le héros qui se réveille et devient un pur RoXXoR de la vie qui défonce tout sur son passage…)
On en vient donc à ces fameux dialogues. Où que j’aille sur le net, ces productions à la Baka… euh je veux dire à la Bakemonogatari dans lesquelles les personnages passent l’épisode à parloter sont encensés, magnifiés, portés en triomphe. Je le crie haut et fort : ils ont tort !
Je ne vais pas refaire le débat ; mais expliquez-moi : qu’en avez-vous à foutre de savoir d’où vient l’expression « cheerio » et si, oui ou non, Togame s’est trompée en voulant prononcer un autre mot ? Quel est l’intérêt d’interrompre 272 fois un combat pour raconter sa vie, son passé, son déjeuner de midi, alors que le dit combat dure en réalité trente secondes (dans le meilleur des cas)? Moi je n’en vois pas, parce qu’il n’y en a pas. Il est déplorable que le format de 50 min soit utilisé pour noyer le spectateur sous un marécage de dialogues à peine intéressants, assommants d’ennui, parfois clairement absurdes. Si vous voulez passer cinquante minutes à lire des sous-titres en bas d’un écran, autant aller lire un bouquin ou une BD !
Comme j’espère vous l’avoir prouvé, Katanagatari est très shônen dans l’esprit. Il use et abuse de clichés bien connus. Mais ce n’est en rien un mal. Au contraire : ce sont les clichés qui m’aident à me repérer dans un univers que je ne connais pas. Un anime qui s’affranchirait de tout cliché serait trop déstabilisant et ne parviendrait pas à rencontrer son public. J’irais même plus loin : Katanagatari aurait peut-être été encore meilleur s’il n’avait pas cherché à faire le malin (au hasard, en supprimant une bonne fois pour toutes les dialogues à rallonge et en raccourcissant le tout). Mais il aurait perdu de sa spécificité ; et je le concède volontiers, s’il n’y avait pas des animes avec du blabla permanent, certains se sentiraient lésés. Ce n’est pas mon style, ce n’est pas ce que je veux voir, mais il en faut.
Je retiendrais Katanagatari comme un très bel anime, qui revisite le genre et lui apporte un peu d’air frais. Je n’hésite pas à le qualifier de Bakemonogatari 2.0, tant la filiation entre les deux œuvres est facile à établir. Une ressemblance qui, pour moi, s’avère être un grave défaut, empêchant l’anime de parvenir à l’excellence. Ceci dit, je le recommande sans aucun problème pour ceux qui veulent du divertissement intelligent et soigné. 7,5/10, arrondi à l’inférieur à cause de la fin, qui déçoit franchement.
Les plus
- Jolie réalisation, jolie musiques
- L'idée des douze sabres à collecter
- Certaines scènes parfois très surprenantes
- Le format 12 x 50 min
Les moins
- personnages principaux horripilants
- la fin complètement ratée
-... je hais Nisioisin ! Ce mec est trop hypé alors qu'il ne sait pas écrire !