Véritable phénomène, Death Note a su, en l’espace de peu de temps, mettre tout le monde d’accord. Les sceptiques de l’animation japonaise et du manga, surpris par la finesse scénaristique de l’œuvre, et par l’ingéniosité des personnages, reviennent peu à peu sur leur opinion, et commencent à acclamer cette œuvre. En bref, Death Note est clairement l’une des séries qui, sur le long terme, va contribuer à l’émancipation des animes et mangas en Europe et aux Etats-Unis. Cela dit, il faut être prudent. Si l’on parcourt le net à la recherche de commentaires concernant la série, on trouvera avant tout les groupies de Kira, puis les pervers fantasmant sur Misa, sans que l’un des deux groupes puisse relever le niveau de l’autre. Certes, Death Note est une très bonne série, mais calmons-nous, ce n’est pas non plus le meilleur anime que le monde ait vu naître, il faut le savoir.
Death Note est avant tout, à mes yeux, un anime commercial, dans le sens où il bénéficie d’un visuel très soigné, très soucieux de la mode concernant les couleurs et le character-design. L’objectif est de séduire le public le plus large possible. Cela dit, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe, cet anime est extrêmement beau, et utilise toutes les dernières technologies à sa disposition, offrant au spectateur une expérience visuel d’une indéniable qualité. L’animation est quasiment sans faille, les décors sont extrêmement détaillés, le character-design est simple mais très efficace, et les Shinigamis sont aussi imposants qu’effrayants.
On pourrait croire que Death Note atteint le sans faute au niveau du visuel, mais il n’en est rien. Seul bémol, mais de taille, toute une partie de la série, entre les épisodes 10 et 20, se voit victime d’une baisse de qualité tout simplement hallucinante. Le character-design se dégrade, les lieux sont moins travaillés, et l’animation perd en réalisme et menace de sombrer dans une affligeante banalité. Heureusement pour nous, visionneurs exigeants, cette chute ne sera que de courte durée, et il ne faudra attendre que peu de temps avant de retrouver avec joie l’esthétique des premiers épisodes. Cela dit, comme toujours, il ne suffit pas d’un visuel aguicheur pour faire une bonne série ; il faut aussi un concept en béton, à la fois novateur, original, et surtout crédible.
C’est avant tout le scénario de Death Note, tordu et pervers, qui rend l’anime si jouissif à suivre. En effet, malgré une histoire qui, à première vue, semble à dormir debout, le scénariste parvient, à l’aide d’un nombre incalculable de raisonnements on ne peut plus logiques, à rendre toute cette histoire crédible. On se perd dans les méandres des esprits sinueux de Kira, de L, et de tous les autres protagonistes de la série. C’est d’ailleurs l’un des aspects les plus agréables de cet anime : les personnages jouant un rôle capital sont extrêmement nombreux.
Je ne vais surprendre personne en affirmant que le développement scénaristique de l’anime possède un rythme fabuleux, et que le scénario en lui-même est poussé, précis, et on ne peut plus original. Death Note est en quelque sorte le premier shônen intellectuel, où les coups ne sont pas physiques, mais métaphysiques. On assiste à une suite incessante de combat entre Kira et ses opposants, et l’on est très souvent subjugué par l’intellect des protagonistes. Dès le début, nous le savons, le possesseur du Death Note va tout faire pour abattre ses ennemis un à un, et créer son nouveau monde, tandis que les autres vont sans cesse risquer leur vie pour le bien de l’humanité. Oui, le potentiel scénaristique de cette série est monstrueux, et ce dès les premiers épisodes. Le seul point posant problème est bien évidemment l’épilogue de ce combat entre le bien et le mal ; c’est d’ailleurs le seul élément qui ait réellement fait diverger les avis. Pour ma part, je suis absolument ravi par la fin de la série, aussi brutale que son commencement, mais bien plus choquante. Le suspense est préservé jusqu’aux dernières minutes, et l’on n’arrive pas à croire à la fin de toute cette histoire. Beaucoup se diront probablement « tout ça pour ça », mais après tout, cette fin est on ne peut plus logique.
Death Note est donc une véritable partie de go, au cours de laquelle les adversaires ne cessent de riposter à l’attaque précédente, tout en acculant l’ennemi, jusqu’à la mort ou l’abandon d’un des participants.
Les musiques, sans être dantesques, remplissent très bien leurs rôles. Comme toujours, j’ai été particulièrement séduit par les instrumentations classiques, ou possédant des sonorités religieuses proches des Stabat Mater et autres messes composées de chœurs. Les premiers opening et ending sont on ne peut plus normaux, avec du J-rock commercial. Les seconds sont par contre beaucoup plus marginaux, avec du hard-rock très agressif, qui en aura rebuté plus d’un. Dans tous les cas, ils demeurent visuellement très complexes et esthétiques ; le résultat est très impressionnant.
Concernant les doubleurs, ils sont tous vraiment faits pour les personnages qu’ils incarnent, et jouent justes des premiers épisodes aux derniers.
Death Note est donc une excellente série, certes très commerciale, mais tout de même intelligente, soignée, et originale. Beaucoup se plaignent du phénomène créé par la série et le manga, par le nombre de néophytes ne jurant que par cette franchise, mais entre nous, je préfère largement un public conquit par une série aussi intelligente que celle-ci, plutôt que par un Naruto pathétique, trop accessible, et trop bon-enfant. Une série sombre et exempte de morale sur de nombreux aspects, à voir et à revoir. Seul le temps nous permettra de la considérer comme un chef-d’œuvre ou non. D’ici là, bon visionnage.